Éditorial

Les obésités


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L'obésité n'existe pas ou n'existe plus, elle est définitivement remplacée par “les obésités”. Ce changement anodin a une très forte signification. Il a été annoncé il y a plus de 20 ans, lorsque l'équipe de la Pitié-Salpêtrière a introduit le concept de médecine de l'obésité. Le pluriel n'y était pas encore, mais l'esprit oui. Il s'agissait déjà d'affirmer que ce symptôme devait être analysé, découpé et disséqué selon ses causes et déterminants, ses phénotypes, ses ­complications, ses trajectoires ; véritable exercice de médecine interne, mais aussi de médecine générale.

Les conséquences sont majeures sur le plan thérapeutique car les bonnes questions vont permettre d'apporter les bonnes réponses. S'agit-il d'une ­obésité génétique (possible si elle est précoce et sévère) ? Quelle est la part du mode de vie (alimentation, activité ­physique, sommeil) ? Est-ce une surcharge à haut risque cardiométabolique (oui si elle est abdominoviscérale) ? Est-on dans la phase dynamique ascendante de la maladie ? Y a-t-il des troubles du comportement alimentaire primitifs ou y a-t-il déjà une restriction cognitive ?

Il s'agit de la seconde grande avancée concernant cette pathologie. La première fut de la déclarer comme une maladie. Cette reconnaissance par l'OMS lui a donné ses lettres de noblesse et a permis de déculpabiliser un certain nombre de patients. Elle a permis d'ouvrir les recherches étiopathogéniques. Il est vrai qu'en donnant un seuil (> 30 kg/m²), on suggérait avec cette définition que c'était une entité univoque. Aujourd'hui, en affirmant que l'on ne peut parler que “des obésités”, on affirme aussi que face à cette hétérogénéité, il n'y a pas une réponse univoque. On passe d'une approche kilos à une approche santé.

L'objectif est parfois simplement de ne plus grossir ; l'objectif est toujours de ne pas nuire et d'aider le patient dans un long chemin à améliorer ce qu'il peut à travers son mode de vie. Un homme obèse de 32 kg/m², stable, ayant une bonne alimentation, une activité physique régulière, un bilan métabolique et hépatique normal, une masse musculaire préservée et un tour de taille < 104 cm ne peut être comparé à un homme de même âge, de même IMC, avec un tour de taille de 115 cm, une alimentation et une hygiène de vie inappropriées associées à des perturbations métaboliques.

Les obésités sont en effet des maladies multifactorielles, hétérogènes, évolutives. De ce fait, elles nécessitent aussi des approches multidisciplinaires. Il était temps de sortir des stéréotypes qui enferment nos patients, les découragent et conduisent à des échecs cruels et à des effets indésirables liés à des régimes dits miracles.

Pour compléter cette évolution, des progrès thérapeutiques médicamenteux voient le jour avec des résultats très encourageants. Il faudra seulement veiller à ce que l'on ne les applique pas aveuglément, comme si l'obésité était unique : elle est diverse.

Références

• Lecerf JM et al. Les obésités : médecine et chirurgie. Paris : Elsevier-Masson, 2021, 693 pages.


Liens d'intérêt

J.M. Lecerf déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet éditorial.

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