Depuis 10 ans, la recherche clinique en oncodermatologie connaît une effervescence sans précédent, conduisant, dans le domaine du mélanome, à l'approbation de 11 molécules depuis 2011. Les succès constatés, notamment avec l'immunothérapie, se déclinent également dans d'autres cancers plus fréquents, créant une synergie profitable à toutes ces spécialités. Si bien qu'il n'est plus question d'attendre le congrès de l'ASCO® (American Society of Clinical Oncology), grand-messe de l'oncologie américaine et mondiale, pour présenter les résultats positifs d'un essai clinique. Le congrès européen équivalent, l'ESMO (European Society for Medical Oncology), est désormais le lieu de présentation de résultats importants, de même que celui de l'AACR (American Association for Cancer Research), traditionnellement plus orienté sur la recherche fondamentale ou clinique précoce. Toutefois, les médecins français sont souvent frustrés du délai d'accès à ces thérapies innovantes en pratique courante. Par exemple, nous disposons maintenant de données solides sur l'efficacité à long terme de la combinaison ipilimumab + nivolumab (6,5 ans), mais son remboursement en France reste curieusement limité aux patients sans mutation BRAF. Deuxième exemple : 2 anti-PD1 ont montré leur bénéfice dans les carcinomes épidermoïdes cutanés avancés, mais 1 seul dispose d'une AMM en France (cémiplimab) et, là encore, il n'est pas remboursé aux établissements qui l'administrent, alors qu'il est disponible dans les autres pays européens. Ce grand écart entre les avancées scientifiques et l'accès aux traitements est de plus en plus périlleux pour les praticiens, d'autant qu'ils ont affaire à des patients très informés, souvent perplexes devant nos explications sur le financement de ces thérapies onéreuses.
Vous trouverez néanmoins dans ce numéro quelques actualités intéressantes présentées à l'ESMO, comme l'arrivée d'un nouveau traitement du mélanome uvéal ou l'intérêt de l'immunothérapie adjuvante dans les mélanomes de stades IIB et IIC, mais aussi un rappel sur l'activité du réseau de cancers cutanés rares (CARADERM) qui permet à tous de soumettre et de colliger des cas complexes. Vous apprécierez la clarté de 2 articles sur l'infection à SARS-CoV-2 qui rythme depuis 2 ans notre quotidien de médecin et de citoyen, et, bien sûr, des cas cliniques pour entretenir notre sagacité de dermatologue. Malgré la lassitude ambiante, sachons apprécier les petits riens du quotidien, et il ne tiendra qu'à nous de passer une belle année 2022 !