L'évolution de la société, plus égalitaire et moins verticale, la diffusion des savoirs, qui entraîne l'augmentation des connaissances en matière de santé des citoyens, et l'épidémie des maladies chroniques, qui nécessite un transfert de compétences des soignants aux patients, ont remis en cause le modèle traditionnel de la relation médecinmalade. Ce modèle parental plus ou moins autoritaire ou bienveillant, mais, dans tous les cas, infantilisant le patient, est né de la maladie aiguë sévère, situation dans laquelle, fréquemment, le patient se défend psychologiquement en régressant. Il est d'ailleurs frappant que le dernier mot du mourant, quel que soit son âge, soit bien souvent “maman”.
Si la relation médecin-malade doit être égalitaire, d'adulte à adulte, il ne faut cependant pas oublier que cette relation est asymétrique. Le patient a droit à la vérité, mais il a aussi le droit de ne pas savoir ou de ne pas tout savoir, ou pas tout, tout de suite. D'où l'art de l'annonce du diagnostic d'une maladie sévère, particulièrement quand on ne connaît pas encore le patient. On ne jette pas un diagnostic de cancer à la figure des gens, comme on le voit faire trop souvent aujourd'hui. Ce n'est pas au radiologue, au biologiste ou à l'infirmière d'annoncer le diagnostic de la maladie grave, mais au médecin ne se cachant pas derrière la “consultation d'annonce”. Encore faut-il qu'il sache prendre le temps, choisir un lieu approprié, procéder si besoin par étapes, permettre au patient d'exprimer son angoisse et de formuler ses questions, revoir ce dernier de façon très rapprochée et l'assurer de sa disponibilité. Ni le téléphone, ni le mail, ni le SMS, ni Skype ne sont des outils appropriés pour le diagnostic de maladie grave, qui doit se faire en permettant au patient de regarder le médecin dans les yeux et au médecin de toucher le patient pour lui témoigner son empathie et son engagement à ses côtés. Ils peuvent être par contre des vecteurs très utiles pour l'accompagnement.