La majorité des lésions pigmentées du fond d’œil (FO) sont bénignes, correspondent à des nævi (figure) et leur diagnostic ne pose pas de problème particulier, mais, parfois, la constatation d’une lésion pigmentée peut engendrer des difficultés diagnostiques, voire thérapeutiques. En effet, très rarement, une petite lésion pigmentée du FO peut déjà correspondre à un mélanome de la choroïde, et le diagnostic de certitude en est parfois difficile.
Devant toute lésion pigmentée du FO, il est donc nécessaire d’en réaliser une analyse sémiologique clinique précise, complétée par une imagerie (rétinographie couleur, OCT et échographie oculaire si la lésion n’est pas parfaitement plane, voire des angiographies à la fluorescéine ou ICG), et de rechercher les désormais bien connus facteurs de risque de croissance [1], afin d’identifier les lésions les plus “suspectes”, aussi appelées “frontières”, qui requièrent une surveillance rapprochée, voire un avis en milieu onco-ophtalmologique pour évaluer la nécessité d’un traitement. La qualité de l’iconographie et des images initiales est essentielle afin de visualiser des modifications au cours du suivi.
Ce dossier est consacré à ces lésions pigmentées dites “suspectes”. Les différents cas décrits mettent en exergue la grande variété des présentations cliniques avec une description détaillée des lésions et l’identification des facteurs de risque, ainsi que la difficulté d’un diagnostic de certitude. Parfois la lésion n’est pas tumorale, comme bien illustré par le cas de néovaisseaux périphériques.
La plupart des lésions pigmentées évolutives (avec croissance documentée) correspondent à de petits mélanomes de la choroïde, mais très exceptionnellement cela peut aussi être une métastase d’un mélanome cutané. Un décollement séreux exsudatif est l’un des facteurs de risque de croissance, mais il peut aussi plus rarement être observé en l’absence de toute transformation maligne, comme dans le cas du nævus compliqué de néovaisseaux choroïdiens.
Si une vigilance particulière est indispensable en présence de facteurs de risque de croissance, un nævus choroïdien d’allure bénigne justifie aussi une surveillance régulière et à long terme en raison des risques exceptionnels, mais non nuls de transformation.
Nous espérons que cet éventail de présentations cliniques permettra d’approfondir vos connaissances sur les lésions choroïdiennes pigmentées pour détecter celles qui nécessiteraient un traitement, car ce sont déjà des petits mélanomes débutants. On peut souhaiter qu’une prise en charge rapide permette une évolution générale plus favorable à défaut d’un bon pronostic fonctionnel, pas toujours possible après un traitement par irradiation.
Bonne lecture à tous.II