L’édition 2024 de l’United European Gastroenterology Week (UEGW) 2024 a eu lieu du 12 au 15 octobre, à Vienne. Les hépatogastroentérologues français se déplacent de moins en moins au congrès de la Digestive Disease Week® (DDW). Il est loin le temps où celui-ci était encore appelé (à tort) le “congrès mondial”. Il s’agit bien du congrès nord-américain, mais la distance, le fait que les médecins souhaitent se déplacer moins longtemps qu’auparavant loin de leur famille (et ils ont raison !) et les moyens de communication actuels permettant à tout scoop de circuler rapidement dans le monde entier expliquent en grande partie ce désamour envers la DDW. Par ricochet, l’UEGW est devenu le congrès majeur de l’année pour les hépatogastroentérologues européens. D’autres congrès comme l’European Crohn´s and Colitis Organisation (ECCO) ou l’European Association for the Study of the Liver (EASL) sont, quant à eux, consacrés à une spécialité.
L’édition 2024 de l’UEGW 2024 peut être considérée comme un congrès de transition. Beaucoup de scoops (VERDICT, GRAVITI, ASTRO, ICARE, EFFICACI, etc.) seront présentés dans les semaines à venir. L’année 2025 sera très riche dans le domaine des MICI !
De nombreuses communications ont porté sur le rôle de l’intelligence artificielle dans la prise en charge des patients atteints de MICI : endoscopie, histologie et dépistage de la dysplasie colorectale. Cela fait désormais près d’une décennie que ce sujet est l’objet d’une attention particulière dans les MICI. Je pense sincèrement que l’intelligence artificielle sera utilisée à grande échelle dans un avenir très proche.
Hors médicaments et outils de surveillance des MICI, la nutrition va représenter le sujet de recherche principal de la décennie à venir. La quête du régime anti-inflammatoire bat son plein, et les premiers essais cliniques avec des résultats prometteurs sont disponibles.
Concernant les traitements avancés, trois classes thérapeutiques ont beaucoup fait parler d’elles, car elles seront bientôt utilisées en routine en France (certaines le sont déjà dans d’autres pays européens ou en Amérique du Nord). Commençons par les inhibiteurs de l’interleukine-23. La course effrénée engagée entre le mirikizumab, le risankizumab et le guselkumab n’est pas toujours facile à suivre. Il y a toujours une bonne raison pour trouver des avantages et des inconvénients à chacun d’entre eux. Cependant, on peut dire de manière objective que ces trois molécules sont différentes ! Les essais GRAVITI et ASTRO viendront peut-être apporter une nouvelle option pour cette classe thérapeutique : la possibilité d’une induction par voie sous-cutanée. Chacun jugera lorsque ces molécules seront remboursées et disponibles en France. Les modulateurs de S1P (ozanimod, étrasimod) sont également en attente de remboursement en France. L’ozanimod ne le sera pas, car son efficacité a été jugée insuffisante chez les patients déjà exposés aux biothérapies. L’étrasimod est en attente de la fixation de son prix qui interviendra au terme d’une négociation habituelle entre le laboratoire pharmaceutique et les autorités de santé. Avoir recours à une molécule orale qui semble bien tolérée et efficace dans la rectocolite hémorragique (RCH) pourrait être intéressant. Reste à savoir désormais si ces modulateurs de S1P sont efficaces dans la maladie de Crohn. Il faudra pour cela attendre encore quelques semaines et les résultats de l’essai randomisé contrôlé GLADIATOR ! Quant aux inhibiteurs du TL1A, les résultats des études de phase III nous diront où positionner ces molécules et quel est leur apport potentiel dans la prise en charge des patients atteints de MICI. Les résultats des études de phase II nous permettent simplement de conclure : ce mécanisme d’action montre son efficacité dans les MICI. Réponse en 2025, encore une fois ! La pression monte, car un 8e mécanisme d’action (s’ajoutant aux anti-TNF, védolizumab, ustékinumab, inhibiteurs de l’interleukine-23, inhibiteurs de JAK, modulateurs de S1P, inhibiteurs du TL1A) pourrait venir bouleverser notre arsenal thérapeutique : l’obéfazimod.
En résumé, au-delà du fait que l’année 2025 devrait rester dans les annales, grâce à des avancées dans le domaine des MICI, la prise en charge de ces patients risque de devenir un véritable casse-tête pour les médecins. Face à cet optimisme ambiant, une note pessimiste est nécessaire pour faire contre-poids à l’optimisme des MICIstes : la guérison est loin, très loin… Qui va-t-on associer avec quoi ? Cette question risque de bien occuper nos esprits dans les mois à venir. En effet, 8 × 8, cela fait 64 associations de thérapies avancées... De nouvelles possibilités thérapeutiques, un espoir supplémentaire pour les patients atteints de MICI et la possibilité d’être suivi et traité à domicile. Le traitement des MICI va donc connaître un avenir radieux. En attendant la guérison ? Réponse en 2025, peut‑être lors de la prochaine édition de l’UEGW.