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Éditorial

L'approche syndromique “multiplex” dans les infections du système nerveux central : forces et faiblesses


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Parmi les différentes applications de l'approche syndromique “multiplex”, les infections du système nerveux central sont probablement celles qui présentent le plus grand intérêt, pour les raisons suivantes :

  • les prélèvements disponibles sont limités (essentiellement liquide cérébrospinal)  : la possibilité de tester de multiples diagnostics avec un seul test sur un faible volume est donc un atout majeur ;
  • le pronostic vital et fonctionnel est très dépendant de la précocité d'instauration d'un traitement adapté – lorsqu'il existe (1). La rapidité de réponse qu'autoriseraient les tests multiplex pourrait donc se traduire par un bénéfice significatif pour les patients ;
  • la clinique permet rarement de distinguer avec précision les multiples étiologies, virales ou bactériennes, au cours des méningoencéphalites comme des méningites. Avoir la possibilité de “ratisser large” lors de la prise en charge initiale peut permettre de pallier ce manque de précision du diagnostic clinique.

Ces tests multiplex présentent néanmoins des limites, qui ont freiné jusqu'ici leur application en routine, et qui imposent de rester vigilants dans leur utilisation. Il ne faut pas que ce nouvel outil conduise à désinvestir le raisonnement clinique, au prétexte que “de toutes façons, le multiplex tranchera !”. Ce serait une erreur majeure, qui aboutirait à ignorer les multiples pathogènes non couverts par les tests actuellement commercialisés (rougeole, tuberculose, de nombreuses arboviroses, certains entérovirus), à occulter les pathologies inflammatoires non infectieuses (encéphalites auto-immunes), ou les diagnostics différentiels (abcès cérébraux, encéphalopathie du sepsis), et enfin à accorder de l'importance à des résultats qui n'en ont en général aucune (PCR HHV-6). Par ailleurs, même si des études pharmacoéconomiques suggèrent que les tests multiplex seraient coût-efficaces pour les infections du système nerveux central, il faut savoir interpréter ces études en fonction du contexte dans lequel elles ont été menées, et principalement :

  • comment ont été triés les patients qui ont bénéficié de ces tests ;
  • quels sont les liens d'intérêts entre les auteurs de ces études et l'industrie qui commercialise ces tests.

Enfin, comme pour tout test diagnostique rapide, leur impact sur la prise en charge des pathologies ciblées est conditionné par les facteurs pré- et post-analytiques, à savoir les délais parfois longs qui s'écoulent entre le prélèvement et la réalisation du test, puis entre l'obtention du résultat et sa prise en compte dans la gestion des patients. Où l'on retrouve les contraintes liées aux laboratoires délocalisés, à leurs heures “opérationnelles”, à la rapidité de communication des résultats aux cliniciens et à la réactivité de ces derniers à la réception des résultats…

Il s'agit néanmoins d'une vraie innovation pratique, dont le développement a été motivé par des préoccupations de terrain, avec des études de validation bien conduites chez les patients qui peuvent bénéficier de ces tests (2). Le monde de l'infectiologie française paraît parfois binaire, face aux innovations : d'un côté ceux qui se précipitent pour faire appliquer la nouveauté dans leur centre, puis l'utilisent à tour de bras en occultant ses limites ; de l'autre ceux qui boudent systématiquement les innovations, au risque de décourager la recherche et le développement dans notre discipline. “Appliquez-vous à garder en toute chose le juste milieu”, disait Confucius. Les tests multiplex ont leur place dans les infections du système nerveux central, il reste à préciser les typologies des patients qui peuvent en bénéficier, et les modalités de réalisation de ces tests qui garantiront que leurs performances se traduisent par un réel bénéfice pour les patients.

Références

1. Stahl JP, Azouvi P, Bruneel F et al. Guidelines on the management of infectious encephalitis in adults. Med Mal Infect 2017;47(3):179-94.

2. Leber AL, Everhart K, Balada-Llasat JM et al. Multicenter evaluation of BioFire FilmArray meningitis/encephalitis panel for detection of bacteria, viruses, and yeast in cerebrospinal fluid specimens. J Clin Microbiol 2016;54(9):2251-61.


Liens d'intérêt

Pierre Tattevin est intervenu comme orateur rémunéré par Biomérieux dans un atelier sur le diagnostic des infections du système nerveux central.

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