L'endocardite infectieuse est une maladie sévère, associée à une mortalité intrahospitalière d'environ 20 % [1]. Dans leur actualisation de 2015, les recommandations européennes préconisent la mise en place d'“endocarditis teams” afin de permettre une prise en charge pluridisciplinaire et coordonnée pour les patients relevant à l'évidence de plusieurs spécialités (recommandation IIa, niveau de preuve B) [2]. Cette équipe doit inclure une expertise en cardiologie, chirurgie cardiaque, réanimation, radiologie, microbiologie, infectiologie et neurologie, afin de couvrir l'ensemble des manifestations et complications de l'endocardite.
Au-delà de l'intérêt théorique de cette approche, certaines équipes ont tenté d'en évaluer l'impact au travers d'études “avant-après”, qui ont mis en évidence une réduction de la mortalité à 1 et 3 ans, obtenue par la standardisation d'une prise en charge pluridisciplinaire avec optimisation médicochirurgicale [3, 4]. Il existe évidemment des biais liés à ce type de méthodologie, et il est impossible d'identifier l'impact spécifique de l'endocarditis team dans l'amélioration du pronostic des patients. Néanmoins, il semble désormais difficile de proposer au patient d'être randomisé dans une étude comparant “prise en charge optimale au cours de laquelle tous les intervenants discutent de votre dossier dans les 24 h” à “vous serez traité par un médecin isolé, sur la foi des recommandations de 1985”. Il faut donc admettre que ces endocarditis teams doivent faire partie de la prise en charge de nos patients. Après une standardisation et une validation interne, les protocoles de diagnostic microbiologique, de bilan radiologique et d'antibiothérapie font rarement l'objet de discussions complexes au sein de l'équipe pluridisciplinaire. C'est plus classiquement autour des discussions chirurgicales que l'endocarditis team prend tout son intérêt. Au-delà des indications urgentes évidentes (le choc cardiogénique, par exemple), les chirurgies pour la prévention de l'embolie sont infiniment plus complexes à décider (qui, quand, comment ?) et reposent sur un partage de compétences et de connaissances transdisciplinaires appliquées aux spécificités du patient (voir l'article dédié de ce numéro spécial, rédigé par G. Hékimian et C.E. Luyt).
L'endocardite illustre bien le rôle clinique majeur que peut jouer l'infectiologue, à l'interface avec de multiples spécialités médicochirurgicales, afin de soigner des patients âgés et comorbides. Autrement dit, toutes les pathologies que nous prenons en charge au quotidien mériteraient un tel degré d'échanges et de transversalité.