Éditorial

CRAtb, nouvel acteur dans le bon usage des antibiotiques


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Depuis quelques mois maintenant, nous assistons à la naissance dans chaque région de France des centres régionaux en antibiothérapie (CRAtb). Sous l’impulsion du ministère de la Santé et de la Prévention, et plus particulièrement dans le cadre de la stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance, les CRAtb ont vu le jour ; mais à quoi correspondent-ils et quelles sont leurs missions ? J’espère vous éclairer un peu plus à travers cet éditorial.

Au commencement, il y avait les CPias (centres d’appui pour la prévention des infections associées aux soins), que tout le monde connaît désormais, avec des fonctions et des missions bien définies : surveillance de la consommation des antibiotiques et des résistances associées, liens forts avec les équipes mobiles d’hygiène (EMH) et j’en passe…

Face à la consommation croissante des antibiotiques en France – quasi championne d’Europe, en plus d’être vice-championne du monde de foot – associée à une augmentation de la résistance des bactéries à Gram négatif, elle-même en lien avec une surmortalité actuelle liée aux bactéries multirésistantes (5 500 décès français en 2015) et une surmortalité galopante à venir selon les modélisations (10 millions de décès dans le monde causés par une bactérie multirésistante (BMR) en 2050, se plaçant d’ici moins de 30 ans devant les décès liés au cancer !), une nouvelle arme de lutte a été pensée : les CRAtb !

Il est prévu un CRAtb par région, soit dans un futur proche 18 CRAtb français. Chaque CRAtb a un lien fort avec l’ARS dont il dépend et qui en assure le financement via la partie prévention du fonds régional d’investissement, sur la base des orientations données par le ministère de la Santé et de la Prévention. Réglementairement, il doit compter dans ses effectifs a minima un médecin infectiologue, qui en est le responsable, et un médecin généraliste. Il est souhaitable qu’il associe différents spécialistes gravitant autour de la prescription des antibiotiques : infectiologues, médecins généralistes, microbiologistes, pharmaciens hospitaliers, hygiénistes, pharmacovigilants, OMEDIT, assurance maladie, etc. Certains de ces acteurs sont regroupés au sein d’un conseil scientifique (CS). Le CS travaille en collaboration avec le CPias régional. Il y a aussi un comité de pilotage, coordonné en partie par l’ARS. L’idée n’étant pas de “réinventer l’eau tiède”, mais de faire émerger des sources nouvelles d’idées et de projets scientifiques. Le CS donne l’impulsion, suggère des programmes d’action et de recherche ; il s’appuie sur différents effecteurs pour leur mise en œuvre. Les principaux effecteurs sont les médecins généralistes impliqués dans ces centres. Leur mission est d’assurer le relais auprès de leurs pairs, médecins généralistes libéraux, médecins coordonnateurs d’EHPAD ou d’autres établissements de soins, notamment les soins médicaux et de réadaptation (SMR, nouvelle appellation des “soins de suite et de réadaptation” – SSR). Le nerf de la guerre se situe en médecine de ville, où la majorité des prescriptions des antibiotiques est réalisée ; la réduction du mésusage (mauvaises indications et posologies, durées des antibiothérapies, meilleure utilisation des tests de diagnostic rapide, etc.) constitue l’un des leviers majeurs. Comme dans beaucoup de domaines médicaux, les difficultés de ressources humaines sont présentes ; le recrutement d’un médecin généraliste impliqué à la fois dans le CRAtb et son cabinet n’est pas toujours chose aisée…

Les CRAtb sont enfin coordonnés au plan national. Des réunions régulières permettent d’échanger, de partager et de construire les projets en organisant les actions.

Pour aider à répondre au mieux aux besoins de terrain, des équipes multidisciplinaires en antibiothérapie (EMA ; oui, je sais, cela fait beaucoup de sigles) voient également le jour. Elles sont composées a minima d’un infectiologue, d’un pharmacien, d’un microbiologiste et d’une infirmière, si possible formée à l’infectiologie et à l’antibiothérapie ambulatoire. À terme, une EMA est prévue par groupement hospitalier territorial (GHT) – rappelons que l’on compte en France 136 GHT répartis sur 100 départements (petit rappel géopolitique). Par exemple, la région Nouvelle-Aquitaine compte 12 départements, 12 GHT (certains départements en possèdent deux, comme les Pyrénées-Atlantiques, en revanche la Haute-Vienne, la Corrèze et la Creuse sont dans le même GHT) et 12 EMA seront à mettre en place. Les EMA seront le bras armé des CRAtb chargés de diffuser “la bonne parole du bon usage” sur le terrain, au plus près des prescripteurs. EMA et EMH travailleront aussi main dans la main. Leur modèle économique est encore en cours de construction, comme il en va souvent des organisations innovantes.

Forts de tout cela, nous espérons tous que nous relèverons le défi ambiant de la décroissance, et particulièrement à cet endroit, celui de la diminution de la prescription des antibiotiques – à une période de tension et de défaut d’approvisionnement, notamment en amoxicilline – et, plus exactement, de la juste prescription des antibiotiques, biens (extrêmement) précieux pour les générations futures.

Références

Pour plus d’information :
https://solidarites-sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/des-politiques-publiques-pour-preserver-l-efficacite-des-antibiotiques/article/prevention-des-infections-et-de-l-antibioresistance-a-l-echelle-regionale


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C. Cazanave déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

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