Éditorial

ESMO 2020 : l'union fait la force


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La découverte de nouvelles molécules actives permettant de combler les manques de la thérapeutique anticancéreuse reste, à ce jour, un impératif pour la cancérologie. L'ESMO n'aura pas failli à son devoir en la matière en nous proposant des résultats de plusieurs nouvelles molécules telles que alpélisib, AMG 160, ipatasertib, sacituzumab govitécan ou sotorasib.

Arrêtons-nous un instant sur cette dernière molécule qui avait déjà été repérée l'année dernière par la rédaction de La Lettre du Cancérologue puisqu'elle s'attaque à un mur jusqu'alors infranchissable : la mutation de KRAS, qui empoisonne le quotidien des oncologues et donc, bien sûr, celui des patients. Le sotorasib s'attaque à une mutation assez commune de KRAS en se fixant de façon spécifique et irréversible à la protéine KRAS G12C, la verrouillant dans un état inactif. David Hong du MD Anderson Cancer Center nous en a présenté les données les plus récentes (abstract 1257O), publiées dans le New England Journal of Medicine concomitamment. Cette étude CodebreaK 100 de phase I montre que le sotorasib est bien toléré. Cette petite molécule révèle une efficacité particulière chez les patients atteints de cancer KRAS G12C avec un taux de réponse confirmé de 32,2 % dans les cancers non à petites cellules du poumon, et un contrôle de la maladie dans 88,1 % des cas à tous les niveaux de doses. Elle agit aussi dans les cancers colorectaux présentant la même mutation KRAS G12C avec un taux de réponse de 7 %, et un contrôle de la maladie était obtenu dans 73,8 % des cas. Ces résultats sont particulièrement novateurs dans cette population de malades, tous réfractaires aux traitements standards qui incluent chimiothérapie et immunothérapie.

Ne nous arrêtons cependant pas à cet effet en monothérapie et écoutons les paroles de D. Hong, le premier auteur qui résume les principales idées stratégiques à développer :

  • la première bien entendu est de “finir l'étude de phase II en cours afin de comprendre le véritable bénéfice et les toxicités sur une population de patients plus large” ;
  • la deuxième est que “ces résultats nous donnent un espoir de développer d'autres inhibiteurs de KRAS ciblant d'autres mutations” ;
  • enfin, les prochaines étapes clés seront de “comprendre quelles sont les meilleures combinaisons de sotorasib avec d'autres thérapeutiques afin d'en faire une option efficace de traitement pour les patients”.

Ces unions de principes thérapeutiques différents ont déjà acquis leurs lettres de noblesse dans plusieurs tumeurs, les cancers du rein, les cancers du poumon, l'hépatocarcinome ; leur aire d'activité s'étend, comme nous le montre l'ESMO 2020, chaque année un peu plus. Elles prétendent même, pour certaines, s'imposer comme de nouveaux standards thérapeutiques, tels que la combinaison chimiothérapie‑immunothérapie dans les cancers de l'estomac et de l'œsophage (qui améliore le taux de réponse, les survies sans progression et globale), et parfois même à un stade précoce, comme la combinaison hormonothérapie ­anti-CD4/6­ également en situation adjuvante dans certains cancers du sein qui a un impact significatif sur les survies sans maladie invasive et sans récidive.

Le défrichage de ces nouvelles combinaisons représente une tâche qui va mobiliser nos énergies dans les années à venir, compte tenu de leur diversité. Elles représentent surtout un sérieux espoir de nouvelles percées dans la thérapeutique anticancéreuse.

Concluons avec la sagesse de Jean de La Fontaine : “Toute puissance est faible, à moins que d'être unie.” (Fable Le Vieillard et ses enfants)



Liens d'intérêt

J.F. Morère déclare avoir des liens d’intérêts avec Roche et Pierre Fabre.

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