Comme chaque année au début de l'automne vient le temps de vacciner contre la grippe les personnes ciblées par la vaccination en France : les personnes âgées de 65 ans et plus, les femmes enceintes, et, quel que soit leur âge, les personnes obèses et les patients présentant une pathologie chronique, en particulier ceux qui sont suivis pour une maladie cardiovasculaire, cardiopathie congénitale, insuffisance cardiaque grave, valvulopathie grave, troubles du rythme graves et coronaropathie (1). C'est alors l'occasion de se poser la question de l'intérêt de cette vaccination et de mettre à jour les autres vaccins selon le calendrier vaccinal en fonction de l'âge et de la vaccination contre les infections à pneumocoque, également recommandée dans cette population quel que soit l'âge.
Quels sont les bénéfices attendus de la vaccination antigrippale dans la prévention des maladies cardiovasculaires ?
Les infections respiratoires représentent la cause la plus fréquente d'hospitalisation chez les patients suivis pour une maladie cardiovasculaire, et un facteur important de mortalité. L'existence d'une maladie cardiovasculaire constitue un facteur de gravité en cas de survenue d'une infection respiratoire, qui sera responsable d'une mortalité augmentée chez ces patients. Par ailleurs, plusieurs études épidémiologiques ont mis en évidence une association entre la survenue d'une infection par le virus de la grippe ou par le pneumocoque et l'apparition d'événements cardiovasculaires sévères, en particulier chez les sujets âgés. Ainsi, dans une étude publiée en 2015 dans le Journal of the American Medical Association, les auteurs rapportent un risque multiplié par 4 de présenter un infarctus du myocarde, un décès de cause cardiovasculaire ou une hospitalisation pour un motif cardiologique dans les 30 jours suivant une pneumonie, le risque restant multiplié par 1,5 jusqu'à 10 ans plus tard (2). La prévention de ces infections doit donc faire l'objet d'une attention particulière, notamment par la vaccination qui reste le moyen de lutte le plus efficace. Des données de plus en plus nombreuses mettent en évidence l'efficacité de la vaccination antigrippale pour réduire la mortalité due aux maladies cardiovasculaires. Une étude de la revue Cochrane montre une réduction de la mortalité cardiovasculaire chez les individus vaccinés avec un odds-ratio de 0,45 (IC95 : 0,26-0,76) [3]. Enfin, des études plus récentes sont en faveur d'une efficacité de la vaccination antigrippale en prévention primaire des maladies cardiovasculaires due à un effet directement protecteur de l'athérosclérose. Ainsi, la vaccination antigrippale est recommandée par l'European Society of Cardiology pour la prévention des maladies cardiovasculaires (4).
La vaccination antigrippale en pratique
Les patients atteints d'une affection de longue durée (ALD), telle qu'une maladie cardiovasculaire ou une autre comorbidité ciblée par la vaccination, vont recevoir un bon de l'assurance maladie leur permettant d'aller chercher leur vaccin et de se faire vacciner par le médecin de leur choix (spécialiste ou médecin traitant) ou, s'il ne s'agit pas de leur première vaccination antigrippale, par une infirmière. La vaccination peut également être prescrite par le médecin traitant ou le cardiologue. Pour la saison 2018-2019 sera disponible en France, pour la première année, un vaccin antigrippal quadrivalent comportant 2 souches d'un virus de type A (comme c'était le cas jusqu'à présent) et 2 souches d'un virus de type B afin d'élargir la protection. Il faut noter que la saison 2017-2018 a été marquée par une épidémie grippale causée à part égale par un virus de type A et un virus de type B qui n'était pas contenu dans le vaccin.
Quels sont les autres vaccins recommandés ?
Les autres vaccins recommandés chez l'adulte en population générale sont :
- les rappels diphtérie-tétanos-poliomyélite à l'âge de 25, 45 et 65 ans, puis tous les 10 ans avec un vaccin comportant la valence coqueluche à l'âge de 25 ans ou en cas de naissance dans l'entourage et chez les professionnels de la santé ;
- le vaccin contre le zona, une dose à administrer entre l'âge de 65 et 74 ans et en l'absence d'immunodépression, y compris chez les personnes ayant déjà fait un zona.
Enfin, spécifiquement chez les personnes à risque que sont les patients suivis pour une maladie cardiovasculaire, la vaccination contre le pneumocoque est recommandée, avec un schéma combiné comportant l'administration séquentielle d'un vaccin conjugué 13 valences (Prevenar 13®) suivi au moins 2 mois plus tard du vaccin non conjugué 23 valences (Pneumovax®).
Avec le vieillissement de la population, la prévention des maladies cardiovasculaires représente un enjeu majeur pour l'avenir. La vaccination doit être considérée comme un acte à part entière dans la prévention secondaire, mais probablement aussi dans la prévention primaire de ces affections. Elle est aussi le moyen le plus efficace pour prévenir les infections, qui sont un facteur important de morbimortalité pour ces patients. Les médecins généralistes jouent un rôle essentiel dans la vaccination de ces patients, mais les cardiologues doivent soutenir leurs efforts à une époque ou beaucoup de Français sont réticents vis-à-vis des vaccins.