Exceptionnellement Paris Santé Femmes a été délocalisé cette année et s’est tenu à Lille où se sont réunis près de 3 000 participants. Tous les aspects de la spécialité ont été évoqués, tant en obstétrique qu’en gynécologie médicale et chirurgicale, en médecine de la reproduction, en sénologie ou en carcinologie. Toutefois, une place particulière a été réservée cette année aux relations soignantspatients et à la bienveillance, thèmes omniprésents dans l’édition 2023.
La bientraitance, l’amélioration du ressenti des femmes, est au cœur de l’activité du Collège depuis l’automne 2021 :
- En octobre 2021, nous avons rédigé la charte de la consultation en gynécologie. Cette charte était destinée à être affichée dans les salles d’attente de tous les gynécologues de France afin que les femmes en prennent connaissance avant d’entrer dans le cabinet du médecin. Nous y rappelions que l’examen clinique est précédé d’une explication sur ses objectifs et ses modalités, que si la femme désire ne pas être examinée, elle est invitée à en faire part au début de la consultation, que l’accord oral de la femme est recueilli avant tout examen clinique et que la personne examinée peut être assistée par l’accompagnant de son choix. Le but de cette charte était d’essayer de restaurer la confiance des femmes, de les rassurer et d’éviter des renoncements aux soins. Cette charte a été suivie dans le même objectif de la Charte de la prise en charge en salle de naissance, en cours de diffusion.
- Nous avons élaboré les recommandations pour la pratique clinique (RPC) sur l’examen pelvien, réalisées avec la collaboration des principales sociétés savantes impliquées en gynécologie-obstétrique et des associations d’usagers. Ces recommandations, qui ont fait grand bruit dans les médias, ont, elles aussi, pour but de rassurer les femmes en précisant dans quelles situations il faut proposer l’examen gynécologique ou la pose d’un spéculum et celles dans lesquelles ce n’est pas utile d’après les données de la littérature. Ces recommandations ne sont pas applicables à toutes les situations cliniques et doivent pouvoir être adaptées individuellement, comme l’a souligné Xavier Deffieux, coordinateur de cette RPC.
- Le Collège a également participé aux travaux du Comité consultatif national d’éthique, de l’Académie de chirurgie, du Conseil national de l’Ordre des médecins sur le consentement aux examens pelviens pour essayer d’arriver tous ensemble et avec les femmes à un consensus permettant des relations de confiance et un respect mutuel.
- Nous avons développé les formations à la bientraitance dans le cadre du label CNGOF-Maternys.
Toutefois, dans le même temps, nous avons également entendu l’inquiétude de la profession. Un examen gynécologique peut être mal ressenti, peut manquer de bienveillance, mais il ne devrait pas être assimilé à un viol, faute de quoi les gynécologues, déjà en manque dans les salles de naissance, deviendront encore de plus en plus rares, tant la profession ressent mal cette assimilation.
Dans l’enquête nationale périnatale 2021, pour la première fois les femmes ont été interrogées 2 mois après l’accouchement. L’enquête a révélé que si 96 % sont satisfaites ou très satisfaites du suivi de leur grossesse et 96 % aussi de leur prise en charge en salle de naissance, 11,7 % gardent un mauvais souvenir de leur accouchement ! 40 % des femmes ont jugé la douleur insupportable à l’expulsion lors des accouchements par voie basse. Là encore, il y a des leçons à tirer de ces chiffres. Dans la vraie vie, accoucher n’est pas toujours facile, une image d’Épinal de l’accouchement a trop été diffusée, et les femmes le jour J sont déçues.
Lors d’une session intitulée “Relations patients-soignants comment restaurer la confiance”, nous avons essayé de comprendre comment nous en sommes arrivés là et comment restaurer des relations de confiance et de respect mutuel indispensables à la prise en charge des femmes dans de bonnes conditions, avec la participation de gynécologues de différentes générations, d’un professeur de droit, d’une sage-femme, d’une représentante des usagères, d’une représentante du Conseil national de l’Ordre des médecins et d’un expert auprès des tribunaux. Lors de cette session, nous avons appris par Yasmine Candau, présidente d’EndoFrance, que malheureusement la charte de la consultation pourtant largement diffusée est très peu affichée. L’association d’usagères EndoFrance a réalisé, l’été 2022, un questionnaire envoyé par mail à 2 576 femmes, 611 réponses ont été reçues (taux de retour de presque 24 %). À la question : “Certains médecins affichent une charte de la consultation et de l’examen dans la salle d’attente. En avez-vous déjà vu et/ou lu une ?”, seules 105 adhérentes ont répondu oui (17 %) et 505 non (82 %). À la question : “Pensez-vous utile qu’une telle charte soit mise à votre disposition ?”, 193 adhérentes ont répondu : “Oui, affichée ou diffusée en salle d’attente” (32 %), 113 “Oui, remise le jour de la consultation, via le personnel médical ou paramédical” (18 %) et 268 “Oui, je préfère la recevoir avant la consultation (courrier, messagerie)” (44 %), seules 36 ont répondu “Non” (6 %).
En clair, la charte est souhaitée par 94 % des femmes, mais seules 17 % en ont vu une chez leur médecin ! Comment expliquer cette différence ? Soit la charte était affichée mais peu visible, soit les médecins ne la connaissaient pas, soit ils n’ont pas jugé utile de l’afficher.
Parmi les nombreux autres sujets traités, citons la prise en charge des vomissements incoercibles et celle du cancer du col, sans oublier les nombreuses sessions consacrées à l’endométriose, au diagnostic anténatal, à l’hypnose en obstétrique, à la communication au sein des équipes, aux IVG entre 14 et 16 semaines, à la prise en charge des personnes transgenres, à la chirurgie gynécologique, à l’intelligence artificielle en sénologie, etc.
Après ce superbe Paris Santé Femmes lillois un autre défi nous attend à la rentrée : le Congrès mondial de la FIGO qui se tiendra à Paris en octobre, et le CNGOF en sera la société hôte, 30 % des sessions seront francophones et nous vous espérons très nombreux pour cet événement mémorable ! Enfin en juin 2024, nous vous accueillerons à nouveau au CNIT rénové avant de retrouver en 2025 le marché de Noël du parvis de la Défense, comme avant !