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Éditorial

Quel avenir pour la prévention ?


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Prévenir un “événement”, c'est, comme l'indique sa racine latine, praevenire, le devancer. Mais pour devancer la survenue d'un événement, encore faut-il le reconnaître, savoir et aussi vouloir le nommer clairement.

La question se pose pour la prévention du déclin cognitif : s'agit-il d'éviter la survenue de la maladie qui le précipite ou en est la cause, de “prévenir” la transformation de ses biomarqueurs ou s'agit-il de devancer l'apparition du déclin cognitif ou celle du déclin fonctionnel, c'est-à-dire celle de la “démence” et, en d'autres termes, celle de la perte d'autonomie ? On le comprend très vite, on ne parle pas de prévention dans ce domaine complexe comme on en parle pour les autres pathologies chroniques telles que le diabète, l'hypertension artérielle ou ­l'insuffisance cardiaque. Les approches, les études et, surtout, leurs objectifs sont très divers, car les questions dépassent l'échelle individuelle, et soulèvent des problématiques familiales, collectives, voire sociétales.

Plus de 1 an après leur publication, les préconisations du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) concernant la mise en œuvre d'une stratégie de prévention de la maladie d'Alzheimer et des maladies apparentées (MAMA) ont-elles été suivies d'effet ? Comment la stratégie nationale de santé qui affichait, en décembre 2017, la prévention comme l'une de ses priorités s'implémente-t-elle dans les politiques mises en œuvre aujourd'hui ? Le moins que l'on puisse dire est que cela n'est pas très clair. Ainsi, dans le plan gouvernemental “Ma Santé 2022” (1), présenté en décembre 2018, il est peu fait mention de la prévention, pourtant présentée comme “centrale” il y a 1 an par le Comité interministériel de la santé, notamment dans le domaine du “bien-vieillir” et de la prévention de la perte ­d'autonomie chez les seniors vivant à domicile (2). La prévention, en général, y est évoquée essentiellement à travers la formation des professionnels de la santé, mais les interventions de prévention conduites par les étudiants en santé dans le cadre du “service sanitaire”, qui sera inclus dans leur cursus, traduiraient-elles seules concrètement la “volonté du gouvernement de placer la prévention au cœur de son action” ? En outre, si  la psychiatrie et la santé mentale sont promues dans “Ma Santé 2022” au rang de priorités, rien n'est précisément évoqué au sujet de la démence et du déclin cognitif. Certes, la volonté de définir des parcours de soins pour les ­principales pathologies chroniques qui y est affirmée a déjà conduit à la publication par la Haute Autorité de santé (HAS), en mai 2018, d'un guide parcours sur les MAMA visant à “diagnostiquer tôt pour mettre en place un parcours de suivi et d'accompagnement adapté” (3). Mais quelles seront les mesures engagées dans le champ sanitaire pour promouvoir une approche préventive du déclin cognitif et des MAMA ou, du moins, soutenir la recherche sur ce sujet ? Y a-t-il (y aura-t-il) une action coordonnée et cohérente des différents opérateurs publics de la santé dans notre pays (ministères de la Santé et de la Recherche, Assurance maladie, HAS, ANSM, etc.) sur ce sujet ? Le Plan maladies neurodégénératives va bientôt prendre fin sans qu'on sache s'il aura une suite… En réalité, la question qui se pose aujourd'hui est de savoir si la démence (et les maladies qui la causent), dont le HCSP recommandait qu'elle soit incluse dans la stratégie nationale de santé, va être ou non considérée explicitement et durablement comme un enjeu prioritaire de santé publique dans notre pays. Le ministère de la Santé a lancé en octobre 2018 une concertation nationale sur la thématique du grand âge et de ­l'autonomie, suscitant une réflexion citoyenne sur la question : “Comment mieux prendre soin de nos aînés ?”, concertation qui devait être finalisée en février 2019 et ­s'inscrire dans la préparation d'une loi sur ce sujet, annoncée pour 2020. L'approche “sanitaire” de la dépendance induite par le déclin cognitif et les maladies qui le précipitent risque-t-elle de s'effacer devant une approche principalement “sociale” ? Alors que le “décloisonnement” est avancé comme l'un des fondements de la politique nationale de santé, l'absence – à ce jour – de référence explicite à la question de la démence et des MAMA dans “Ma Santé 2022” laisse craindre qu'elle soit occultée par la problématique “Grand âge et autonomie”. Pourtant, les 2 approches, médicale et médicosociale, ne sont pas exclusives, loin de là !

Références

1. Ministère des Solidarités et de la Santé. Ma santé 2022 : un engagement collectif. 2018. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/ma_sante_2022_pages_vdef_.pdf

2. Comité interministériel pour la santé. Priorité prévention : rester en bonne santé tout au long de sa vie. 2018. https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2018/03/dossier_de_presse_-_priorite_prevention_rester_en_bonne_sante_tout_au_long_de_sa_vie.pdf

3. Haute Autorité de santé. Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : diagnostiquer tôt pour mettre en place un parcours de soins et d’accompagnement adapté. 2018. https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2851128/fr/maladie-d-alzheimer-et-maladies-apparentees-diagnostiquer-tot-pour-mettre-en-place-un-parcours-de-soins-et-d-­accompagnement-adapte


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M. Ceccaldi déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

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