L'autisme a longtemps été considéré comme une maladie psychiatrique résultant d'un trouble affectif de l'attachement de la mère à son enfant. Des générations de mères ont ainsi été culpabilisées, l'autisme de leur enfant étant attribué à leur supposée “froideur”. Cette théorie, on le sait désormais, était fausse, mais elle a eu le temps de faire beaucoup de ravages et de dévaster bien des mères déjà accablées par la pathologie de leur enfant. De façon ironique, des études ultérieures fondées sur l'observation de la relation maman/bébé ont même montré que ces mères de nourrissons autistes étaient, au contraire, plus attentionnées !
On sait désormais que l'autisme et, plus largement, le trouble du spectre de l'autisme (TSA) sont des troubles neurodéveloppementaux entraînant un fonctionnement différent des réseaux cérébraux, sans lésion observable à l'imagerie structurelle. Les recherches récentes suggèrent que l'autisme débuterait in utero, et des mutations génétiques ont été identifiées dans des gènes impliqués dans la construction et le fonctionnement synaptiques, d'où l'hypothèse d'un dysfonctionnement de la synapse glutamatergique dans l'autisme (article de Frédérique Bonnet-Brilhault). L'imagerie, notamment fonctionnelle, a énormément aidé à cette compréhension physiopathologique. Un très grand nombre d'études d'imagerie cérébrale ont ainsi permis d'objectiver des anomalies localisées au sein du réseau du cerveau social dans les TSA, notamment au niveau du sillon temporal supérieur, une région-clé pour le traitement de l'information sociale (article de Monica Zilbovicius et Ana Saitovitch).
L'autisme et le TSA sont des pathologies fréquentes : la prévalence des TSA est estimée à 1 % en population générale. La suspicion d'un diagnostic de TSA chez un enfant, un adolescent ou un adulte impose une évaluation approfondie et multidisciplinaire. L'idée est d'améliorer la formation sur ces troubles et de permettre une meilleure reconnaissance des signes d'appel du TSA à tous les âges de la vie, quels que soient le niveau intellectuel ou l'intensité de la symptomatologie (article d'Hélène Vulser et Pauline Chaste). On gardera par ailleurs à l'esprit que la déficience intellectuelle vraie n'est retrouvée que dans une fraction seulement des tableaux autistiques et qu'il faut précisément l'évaluer avec des outils dédiés pour orienter le raisonnement syndromique et étiologique (article de Laurent Mottron et David Gagnon). L'espoir reste de mise dans l'autisme, grâce à une meilleure compréhension physiopathologique de la maladie, un diagnostic plus précoce, des bilans plus adaptés et surtout, et ce même en l'absence de traitement biomédical dédié, la démonstration que des interventions comportementales précoces de première intention peuvent améliorer la symptomatologie (article d'Amaria Baghdadli).
Je conclurai en reprenant les mots du Pr Baghdadli : “Les recherches futures devront enfin s'inscrire dans une forte interdisciplinarité en génétique, neuro-imagerie, épidémiologie et études interventionnelles”, et en remerciant chaleureusement tous les auteurs de ce très beau dossier !