Au début des années 1990, lorsque j’ai commencé mon internat de neurologie, un de mes oncles – médecin généraliste – m’a félicité pour mon succès et mon choix de spécialité ; il s’est empressé d’ajouter qu’il s’agissait d’une superbe spécialité, totalement contemplative…
Trente ans plus tard, le dossier que nous vous proposons ce mois-ci, en marge des Journées de neurologie de langue française, souligne le chemin parcouru dans le domaine de la thérapeutique en neurologie, notamment celui des biothérapies. La pathologie qui a ouvert la voie, dès 2007, a été la sclérose en plaques (SEP) avec le natalizumab, mais d’autres lui ont emboîté le pas ces dernières années. La neurologie a bénéficié de l’expérience de spécialités comme la rhumatologie ou la gastroentérologie et s’est rapidement appropriée ces thérapies innovantes. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé à un rhumatologue, Renaud Felten, d’ouvrir ce dossier et de présenter l’expérience de sa discipline dans ce domaine. Ensuite, nous avons souhaité offrir à différents neurologues experts l’opportunité d’exposer les avancées thérapeutiques dans le domaine des biothérapies pour chaque surspécialité. Ainsi, ce dossier très complet aborde les biothérapies dans la SEP, mais également dans la neuromyélite optique, la pathologie migraineuse, la myasthénie et les polyradiculonévrites chroniques, ainsi que dans la maladie d’Alzheimer. L’intérêt de cette approche est d’avoir une vision globale de l’ensemble des biothérapies en neurologie, certaines comme les anti-CD20, les anticompléments, les anti-FcRn ayant des indications dans plusieurs pathologies. Nous apprenons beaucoup de la mise en commun de nos différents traitements, de l’expérience de leur efficacité mais également et, peut-être surtout, de leur tolérance. En effet, la seule limitation actuelle à une utilisation plus large de ces molécules, en dehors de leur coût, reste l’absence de recul sur l’exposition à ces traitements à très long terme. Là encore, nous bénéficions de l’expérience de nos collègues d’autres spécialités et aussi de l’apport des registres tels que l’OFSEP ou FILNEMUS. Il est probable que dans les années à venir le pourcentage de patients qui se verront proposer ces traitements va augmenter de façon importante en raison de l’expérience des neurologues en la matière, à condition bien sûr que le profil d’excellente tolérance se confirme.
Il suffit en tout cas d’écouter un patient atteint de SEP libre de poussée depuis 10 ans et totalement autonome ou un patient myasthénique ayant bénéficié d’une épargne cortisonée complète, pour comprendre ce que les biothérapies ont apporté à la neurologie et aux patients depuis bientôt 15 ans. Certaines pathologies (migraine, polyradiculonévrite chronique, etc.) ne sont qu’au début de l’aventure, mais tout semble démontrer que, dans ces pathologies également, ces médicaments vont changer la vie de nos patients.
Bonne lecture à tous !