Éditorial

De 3 à 11 vaccins obligatoires depuis le 1er janvier 2018 !


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En France, depuis le 1er janvier 2018, les parents ont l'obligation de vacciner leurs enfants contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, les infections à Haemophilus influenzae de type b, la coqueluche, l'hépatite B, la rougeole, les oreillons, la rubéole, le méningocoque C et les infections à pneumocoques. Alors que les vaccinations contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite étaient respectivement obligatoires depuis 1938, 1940 et 1964, les autres vaccins, introduits plus récemment dans le calendrier vaccinal, n'étaient “que” recommandés, ce qui pouvait laisser penser qu'ils étaient moins utiles.

Cette décision d'élargir les obligations aux 11 vaccins nécessaires à la protection du petit enfant peut surprendre. Elle fait l'objet de critiques parfois sévères, en particulier de ceux qui doutent de l'intérêt et de la sécurité des vaccins (40 % des Français émettent des doutes vis-à-vis de la sécurité des vaccins et 17 % ne sont pas certains de leur efficacité, selon l'étude coordonnée par la London School of Hygiene & Tropical Medicine) [1].
Elle est cependant le fruit d'une réflexion menée depuis plusieurs années, ayant abouti aux constatations que :
1/ les couvertures vaccinales sont insuffisantes pour certains vaccins (70 % pour la vaccination contre le méningocoque C à 2 ans, moins de 80 % pour la vaccination contre la rougeole 2 doses), alors qu'elles sont supérieures à 95 % pour la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, la coqueluche et Haemophilus ; 2/ les données épidémiologiques sont le reflet de ces couvertures vaccinales insuffisantes (épidémie récente de rougeole [2], échec de la vaccination contre le méningocoque C, en particulier pour la protection des enfants de moins de 1 an) ; et 3/ une augmentation sensible au cours des dernières années de la défiance vis-à-vis des vaccins chez les Français, y compris chez les professionnels de santé.

Au cours des 5 dernières années, cette réflexion a donné lieu à 2 rapports du Haut Conseil de la santé publique et un rapport de la députée Sandrine Hurel, conduisant à la mise en place d'une concertation citoyenne sur la vaccination. Les recommandations du comité de coordination de la concertation citoyenne pour restaurer la confiance vis-à-vis des vaccins et améliorer la protection de la population ont été rendues publiques en octobre 2016. Elles soulignent le “caractère impératif et indispensable” du programme de vaccination, à des fins de protection tant individuelle que collective, et la nécessité d'un “engagement ferme et résolu de l'État et des autorités sanitaires dans la durée”. Elles insistent sur l' “exigence citoyenne de transparence”, la nécessité de simplifier le parcours vaccinal et celle de la gratuité des vaccins ; elles précisent qu'il convient d'améliorer la formation des professionnels de santé et l'information du public et des professionnels de santé, de développer la recherche et, enfin, de supprimer la coexistence des statuts obligatoires/recommandés des vaccins chez l'enfant, en privilégiant de façon temporaire l'élargissement des obligations vaccinales. Quelques semaines après la présentation de ces recommandations, le Conseil d'État a enjoint à la ministre chargée de la Santé de prendre des mesures pour rendre disponibles des vaccins correspondant aux seules obligations de vaccination, le vaccin diphtérie-tétanos-poliomyélite répondant à cette exigence n'étant que très difficilement accessible. Il s'avérait alors urgent de prendre une décision quant à la suppression des obligations ou à leur élargissement au minimum au vaccin pentavalent (diphtérie, tétanos, poliomyélite, H. influenzae, coqueluche). C'est finalement la solution préconisée par le comité d'orientation qui a été retenue par la nouvelle ministre de la Santé, le Pr Agnès Buzyn, avec le soutien du Premier ministre, faisant de la vaccination un sujet de son discours de politique générale en juillet 2017. La loi sur l'extension des obligations vaccinales a été votée en première lecture le 29 octobre 2017, et celle de financement de la Sécurité sociale comportant l'obligation vaccinale, adoptée et validée par le Conseil constitutionnel le 21 décembre 2017.

L'élargissement des obligations permettra-t-elle d'améliorer la protection des petits ? On peut le penser, et la surveillance de la couverture vaccinale nous apportera rapidement la réponse à cette question. La seconde étape, qui démarre maintenant, va nécessiter de restaurer la confiance afin de supprimer ces obligations, mais aussi d'assurer la protection des grands enfants et des adultes. Pour ce faire, le rôle des infectiologues est évidemment majeur, en particulier pour la vaccination des populations à risque, la formation initiale et continue et la sensibilisation des professionnels de santé et des étudiants en santé ou encore l'implication dans la recherche en vaccinologie. C'est seulement à ce prix et en lien étroit avec les autres praticiens impliqués, en particulier les médecins généralistes, que nous pourrons avoir en France une politique vaccinale digne de ce nom !

Références

1. Larson HJ, de Figueiredo A, Xiahong Z et al. The State of vaccine confidence 2016: global insights through a 67-country survey.
EBioMedicine 2016;12:295-301.

2. Antona D, Lévy-Bruhl D, Baudon C et al. Measles elimination efforts and 2008-2011 outbreak, France. Emerg Infect Dis 2013;19(3):357-64.


Liens d'intérêt

L’auteur déclare avoir des liens d’intérêts avec Janssen, MSD, Pfizer, Sanofi Pasteur, dans le cadre d’activités ponctuelles.

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