L’asthme est une maladie inflammatoire des voies aériennes dont la fréquence, la morbidité et la mortalité constituent des enjeux de santé publique. Au niveau mondial, on estime que 300 millions d’individus sont affectés par un asthme, alors que 10 % des adultes et 2,5 % des enfants présentent une forme sévère de la maladie [1]. En France, les dernières données épidémiologiques montrent que plus de 4 millions de personnes sont asthmatiques [2]. Su la période 2014-2015, 63 000 séjours hospitaliers pour asthme ont été enregistrés et 851 décès par asthme sont survenus, soit un taux brut de mortalité par asthme de 1,3/100 000 habitants. Une diminution de la mortalité par asthme est observée depuis les années 1980 avec, par exemple, 2 055 décès en 1988 et 1 129 décès en 2005. Cette tendance est probablement liée à une meilleure compréhension des mécanismes en cause, à l’identification et à l’éviction des facteurs déclenchants (allergènes, irritants, polluants), à la prévention des infections, à l’éducation des patients et à l’administration de médicaments inhalés en traitement de fond.
La prise en charge de l’asthme repose en effet sur un traitement de fond quotidien dont la pierre angulaire est la corticothérapie inhalée [3]. Les corticoïdes inhalés agissent sur les multiples acteurs cellulaires pro-inflammatoires impliqués dans la physiopathologie de l’asthme, ce qui se traduit cliniquement par une réduction des symptômes respiratoires, une prévention des exacerbations de la maladie et une amélioration significative de la fonction respiratoire. L’association corticoïde et bronchodilatateur de longue durée d’action majore ces effets bénéfiques, si tant est que ces médicaments inhalés soient utilisés correctement, avec une bonne technique d’inhalation et un observance quotidienne rigoureuse, et non de manière anarchique. La seconde révolution thérapeutique dans l’asthme est le développement de biomédicaments ciblés contre des médiateurs (immunoglobuline E), des cytokines (interleukine 5, TSLP) ou des récepteurs de cytokines (IL-5R, IL-4/IL-13R) impliqués dans la genèse et l’entretien de l’inflammation des voies aériennes. Ces médicaments innovants sont réservés aux patients atteints d’asthme sévère et ont prouvé leur efficacité sur la réduction des exacerbations de l’asthme et, pour certaines d’entre elles, sur le sevrage en corticoïde oral au long cours. En France, 5 biothérapies (omalizumab, mépolizumab, benralizumab, dupilumab, tézépélumab) ont obtenu l’autorisation de mise sur le marché dans l’asthme sévère entre 2005 (l’omalizumab, anticorps anti-IgE) et 2023 (le tézépélumab, anticorps anti-TSLP).
Le problème de l’asthme est-il résolu pour autant ? À l’évidence non, étant donné les chiffres de morbi-mortalité liée à l’asthme, dont l’actualisation est attendue, et compte tenu des risques inhérents au mésusage des médicaments antiasthmatiques. La pharmacologie apporte, par sa diversité et ses multiples facettes, des clés pour mieux comprendre la pharmacocinétique des médicaments inhalés et des biothérapies ainsi que les mécanismes d’action de ces médicaments en termes d’efficacité et d’effets indésirables. Elle permet aussi d’analyser les données des essais cliniques pour sélectionner au mieux les patients susceptibles de bénéficier de médicaments innovants, et de définir des objectifs thérapeutiques pertinents. La pharmacologie au service du bon usage des médicaments et au service des patients : telle est la ligne directrice de ce numéro que nous vous proposons.
Bonne lecture à toutes et à tous !