La morbidité et la mortalité liées au tabac comprennent un large éventail de maladies. C'est au cancer du poumon, au cancer du larynx et aux maladies cardiovasculaires que le tabagisme est le plus fortement associé ; on sait moins que le tabagisme constitue aussi un facteur de risque pour le cancer du sein et de la prostate, la cirrhose hépatique, l'hypertension essentielle et d'origine rénale, le diabète de type 2 (1). L'excès de mortalité dû au tabac est similaire chez les hommes et les femmes (1, 2). La réduction de l'espérance de vie d'un fumeur est estimée à 10 à 15 ans (2, 3). L'éradication du tabagisme prolongera l'espérance de vie mais aussi la qualité de vie de l'ensemble d'une population.
Le tabagisme peut également toucher la génération suivante. De nombreuses études montrent que non seulement le tabagisme maternel a des effets négatifs sur la grossesse et sur la périnatalité, mais aussi qu'il peut avoir, après la naissance, un retentissement sur la vie entière de l'enfant exposé au tabac in utero, qui, par exemple, peut devenir fumeur, être atteint de troubles du comportement, d'asthme ou d'obésité (4).
Il y a environ 13 millions de fumeurs en France, ce qui la place aux derniers rangs des pays développés. Des rapports alarmants ont attiré l'attention des politiques et des médias sur ce fléau de santé publique (5, 6). Par la suite, le Plan cancer 2014-2019 ainsi que le Plan national de réduction du tabagisme (PNRT) ont enfin fait bouger les choses en élargissant le champ d'application du forfait de 150 euros des substituts nicotiniques en permettant leur prescription par des professionnels de santé comme les infirmiers, les chirurgiens-dentistes, etc., et en déclenchant une mobilisation nationale sous la forme de la campagne “Moi(s) sans tabac”, en novembre 2016.
Le “paysage tabagique” a largement été modifié par l'apparition des cigarettes électroniques. Bien que, à ce jour, on ne connaisse pas bien le rapport bénéfice/risque de ces produits classifiés comme produits de consommation, les études observationnelles tendent à montrer que la cigarette électronique est une aide potentielle à l'arrêt des cigarettes à combustion. Si ce bénéfice est confirmé par des essais randomisés, contrôlés et comparatifs de puissance suffisante, et si les cigarettes électroniques ont un profil d'effets indésirables acceptable, la cigarette électronique pourra contribuer à l'éradication totale du tabagisme. Toutefois, le dernier rapport du Surgeon General (États-Unis) souligne que la cigarette électronique chez les adolescents représente une auto-administration de nicotine, ce qui peut augmenter le risque d'initiation aux produits du tabac (cigarettes et autres) et le développement d'une addiction (7). Les 2 aspects ne sont pas incompatibles, voire peuvent être liés : si la cigarette électronique contenant de la nicotine se révèle être une aide à l'arrêt du tabac, le même produit délivrant de la nicotine, hautement addictogène, peut favoriser le passage de la cigarette électronique aux produits du tabac.
Dans ce contexte, en 2017, l'objectif de ce numéro transversal est d'attirer l'attention des professionnels de santé, actifs dans différentes disciplines, sur l'importance clinique et de santé publique du tabagisme. Bien entendu, ce numéro n'est pas exhaustif et concerne seulement certains sujets sélectionnés selon leur impact ou leur nouveauté. Nous espérons qu'il contribuera à la diminution de l'incidence et de la prévalence du tabagisme en France.