La spondyloarthrite axiale non radiographique a obtenu droit de cité avec l'avènement des critères de classification de l'ASAS (Assessment of SpondyloArthritis international Society) en 2009-2011. Définie par un tableau clinico-anamnestique évocateur (avec radiographies dessacro‑iliaques normales) associé soit à une sacro-iliite à l'IRM (représentant alors le “bras imagerie”), soit à la présence de HLA-B27 (“bras clinique”), la spondyloarthrite axiale non radiographique ne se limite pas à une forme précoce, “préradiographique”, car son évolution ultérieure vers une forme radiographique n'est pas obligatoire.
Son positionnement au sein des spondyloarthrites soulève des questions : simple forme clinique ou entité propre ? La discussion n'est pas simplement académique dans la mesure où des autorisations de mise sur le marché (AMM) spécifiques de biomédicaments potentiellement coûteux concernent les spondyloarthrites axiales non radiographiques. Leur proportion est plus importante dans les formes récentes de la maladie : elle est passée des deux tiers à moins de 1 an d'évolution à un peu plus du quart après 12 ans d'évolution. Dans la cohorte DESIR, il a été observé un passage d'une forme non radiographique à une forme radiographique dans moins de 5 % des cas en 2 ans. Les facteurs associés à la progression structurale des sacro-iliaques dans cette cohorte sont : la présence de HLA-B27, une IRM des sacro-iliaques positive au départ, et le tabagisme également au départ. De minimes différences entre le bras imagerie et le bras clinique de spondyloarthrites axiales non radiographiques ont été rapportées, de façon discordante, dans quelques cohortes.
Les études comparant les formes radiographiques (spondylarthrite ankylosante) et les formes non radiographiques de spondyloarthrite axiale ont montré que le poids et l'impact de la maladie étaient équivalents dans les 2 présentations (activité de la maladie, retentissement fonctionnel) justifiant ainsi le même recours aux options thérapeutiques (biomédicaments) [1, 2]. Une efficacité équivalente est observée sur les formes radiographiques et non radiographiques, tant pour les AINS que pour les agents anti-TNF et, plus récemment, les anti-IL-17.
Cependant, les évaluations épidémiologiques ont mis en lumière certaines particularités associées aux formes non radiographiques : prédominance féminine, moindre occurrence de CRP élevée, fréquence de l'atteinte périphérique (arthrites, enthèses et dactylites), moindre fréquence d'uvéites. Certains de ces éléments sont partagés avec les formes associées à une fibromyalgie. On sait qu'une telle association interfère avec l'évaluation de l'activité de la maladie et de la réponse thérapeutique, pouvant conduire à un risque de surtraitement.
Par ailleurs, sur le plan structural, on sait que la progression est plus marquée en présence de lésions radiographiques préexistantes, et un traitement précoce efficace pourrait ainsi prévenir ou ralentir les dégâts structuraux à long terme.
Il faut cependant rappeler que, dans les formes non radiographiques, les cas sans signe objectif d'inflammation (IRM et CRP normales) n'ont pas plus de réponse thérapeutique sous anti-TNF que sous placebo. Donc la spondyloarthrite axiale non radiographique est une entité qui peut permettre un diagnostic plus précoce, d'une part, mais expose au risque de surdiagnostic et de surtraitement, d'autre part, donc au centre de 2 extrêmes pour le patient. Ces réflexions soulignent l'intérêt de la conviction du rhumatologue pour le diagnostic et incitent à rappeler l'absence d'indication de biomédicament dans les formes non radiographiques de spondyloarthrite axiale en l'absence de signes objectifs d'inflammation, même si le score d'activité BASDAI (évalué par le patient) est supérieur à 4/10 [3].