Les objectifs de la stratégie thérapeutique dans la spondyloarthrite axiale sont de contrôler les signes, les symptômes et l'activité de la maladie, et de tendre vers une rémission ou, au moins, vers un faible niveau d'activité dans un contexte de traitement à la cible (treat-to-target, ou T2T), associé à un contrôle rapproché [1].
Dans les rhumatismes inflammatoires chroniques périphériques, l'effet structural des traitements fait partie de la définition d'un DMARD (disease‑modifying antirheumatic drug) censé modifier le cours évolutif de la maladie, avec des arguments confortant la stratégie T2T et la fenêtre d'opportunité.
La situation dans la spondyloarthrite axiale est différente : l'évolution structurale varie d'un patient à l'autre et dans le temps chez un même patient, et elle représente un processus lent. L'histoire naturelle a montré que la progression radiographique structurale au rachis se faisait en différentes étapes : inflammation et érosion, puis ossification sous-ligamentaire à l'origine du syndesmophyte, qui peut aboutir à l'ankylose. Cette évolution structurale reconnaît certains facteurs de déterminisme (inflammation IRM préalable, présence de lésions structurales radiographiques du rachis, IMC, HLA-B27, tabac, sollicitations mécaniques) [2]. Évaluée par le mSASSS (modified stoke ankylosing spondylitis spinal score), la progression radiographique pertinente cliniquement est de 2 unités en 2 ans. Cela explique la difficulté de visualiser sur le court terme un ralentissement de progression sous traitement, en particulier dans les formes non radiographiques, moins susceptibles de progresser. Plusieurs profils d'évolution structurale rachidienne ont en effet été mis en évidence.
Les AINS restent un traitement symptomatique. Leur impact sur l'évolution structurale rachidienne dans la spondyloarthrite axiale reste discuté [3], avec une moindre progression radiographique en cas de prise continue de célécoxib, comparativement à une prise à la demande sur 2 ans (différence minime) ; ce résultat n'est pas observé avec le diclofénac. Pour les anti-TNF, les études d'extension à 2 ans n'ont pas mis en évidence de différence statistiquement significative de progression du score mSASSS en 2 ans comparativement à des cohortes historiques [2, 4]. Des études rétrospectives et de cohortes ont montré un moindre ralentissement de la progression structurale radiographique en cas d'exposition prolongée (au-delà de 4 ans) aux anti-TNF ou en comparant des intervalles d'exposition et de non-exposition [5, 6]. Pour les anti-IL-17, il a été noté un fort pourcentage de non-progresseurs radiographiques dans les études d'extension à 2 ans et plus (absence de groupe contrôle sur cette durée). Pour les anti-IL-17 et les inhibiteurs de JAK, une diminution des scores inflammatoires IRM a été observée versus placebo à 6 mois.
On voit donc que le niveau de preuve d'un éventuel effet structural des différents traitements de la spondyloarthrite axiale est peu élevé et que les arguments sont indirects. Est-il légitime d'exposer un patient à un traitement AINS à pleine dose de façon continue et prolongée, même en l'absence de symptômes, dans le seul but (hypothétique) d'éviter la progression de 1 point du score mSASSS en 2 ans ? Faut-il attendre 4 ans d'exposition aux anti-TNF pour juger de leur efficacité ? Certes, on peut imaginer que l'extinction des signaux inflammatoires vertébraux en IRM ait pour conséquence une moindre incidence de syndesmophytes quelques années plus tard… mais cela n'est pas démontré de façon formelle.
L'enjeu de l'effet structural n'est pas le même dans la spondyloarthrite axiale et dans les rhumatismes inflammatoires périphériques. Cela permet de comprendre que l'évolution structurale n'est pas un moyen d'évaluation d'efficacité thérapeutique dans la spondyloarthrite axiale, ni un objectif thérapeutique à court terme.