Éditorial

Que de congrès, que de rencontres !


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Deux comptes-rendus de congrès sont à découvrir dans ce numéro de La Lettre du Sénologue, l'un nous vient du Texas et l'autre de Nice.

San Antonio, et sa rivière enchantée qui serpente d'hôtel en hôtel, est devenue La Mecque du cancer du sein, alors qu'initialement il s'agissait d'un petit congrès d'environ 300 personnes, intimiste presque… Laurent Zelek en a tiré les enseignements essentiels : pas de scoop majeur, il ne peut pas y en avoir tous les 6 mois, mais des confirmations : par exemple, sur le bénéfice de l'abémaciclib en adjuvant chez des patientes atteintes d'un cancer du sein RH+ HER2− à haut risque de récidive (> 4 N+ ou 1 à 3 N+ et T3 ou grade 3 ou un Ki67 > 20 %), la survie sans maladie invasive à 4 ans passant de 79,4 à 85,8 %, avec un bénéfice qui continue à augmenter avec le temps. Tout récemment, la Food and Drug Administration a élargi les indications du traitement par hormonothérapie en association avec l'abémaciclib, en retirant la nécessité d'avoir un Ki67 ≥ 20 %. Il faut noter qu'avec ce recul encore limité, le bénéfice en survie globale n'a pas encore été démontré.

L'autre bonne nouvelle, ce sont les résultats de l'étude POSITIVE. Plus grand monde n'en doute maintenant, la grossesse, après un cancer du sein, n'augmente pas le risque de rechute, y compris en cas de cancer RH+, voire le diminue, même en ajustant les résultats en tenant compte de l'“healthy mother effect” (comme quoi, les hormones, c'est plus compliqué qu'on ne croit). Cependant, lorsque l'on a un cancer à 38 ans et qu'après la chimiothérapie on doit poursuivre une hormonothérapie pendant 5 à 10 ans, il devient impossible d'être enceinte. Pouvait-on suspendre l'hormonothérapie le temps de mener à bien une grossesse et la reprendre à l'issue de cette dernière ? Impossible de mener un essai randomisé sur le sujet. Eh bien, il semble que cela soit possible ! Il n'y a pas plus de rechutes dans la cohorte POSITIVE que dans une population identique au sein des essais SOFT et TEXT.

Et en situation métastatique ? Chez les patientes atteintes d'un cancer RH+ HER2−, y a-t-il un traitement plus efficace que le fulvestrant ? Le capivasertib, inhibiteur d'AKT, a amélioré la survie sans progression, qui passe de 3,6 mois sous fulvestrant seul à 7,2 mois. Chez les patientes dont la tumeur présente une altération de la voie AKT, on ne note aucune efficacité supplémentaire, la survie sans progression passant de 3,1 à 7,3 mois. La tolérance semble correcte, avec peu d'élévation de la glycémie, à la différence de ce qui est observé avec l'alpélisib. Toujours après progression sous hormonothérapie et inhibiteurs de CDK4/6, de nouveaux “dégradeurs” des récepteurs d'estrogènes (SERD) se développent (élacestrant, camizestrant), avec une efficacité significative, notamment en cas de mutation du récepteur des estrogènes (ESR1).

Et en dehors des cancers RH+ ? La confirmation, en cas d'amplification de HER2, du bénéfice en survie, y compris globale, du trastuzumab déruxtécan par rapport au trastuzumab emtansine.

Véronique Diéras, quant à elle, a su extraire toute la substantifique moelle du congrès de la SFSPM (Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire), qui s'est tenu à Nice, avec un thème ambitieux “Le cancer du sein chez la femme de moins de 40 ans et de plus de 70 ans”. Les cancers du sein survenant avant 40 ans représentent 5 % de l'ensemble des cancers du sein en France, soit en 2018, 2 932 nouveaux cas, et chez les femmes de 70 ans et plus, 33 % de l'ensemble des cancers du sein, soit en 2018 toujours, 19 271 cas, et un nombre de décès par cancer du sein de 7 481, soit 61 % de l'ensemble des décès par cancer du sein. C'est dire l'importance de ces sujets.

Chez les femmes jeunes, l'imagerie peut être faussement rassurante avec un aspect pseudo-bénin, une plus faible suspicion de cancer de la part des radiologues et des cliniciens et des délais diagnostiques plus longs. Les mutations génétiques sont plus fréquentes. L'âge jeune est associé à des facteurs de plus mauvais pronostic, avec une augmentation du risque de mortalité et un excès de rechutes locales après traitement conservateur. Les retentissements “psychosociaux” sont importants.

Quant aux femmes de plus de 70 ans, il est fondamental de prendre en compte que plus on est vieux, plus on va vivre vieux ! Une femme de 85 ans a encore 10,6 ans d'espérance de vie. La place des seniors augmente rapidement : en 2018, les personnes de plus de 65 ans représentaient 20 % de la population, en 2070, ce sera 29 %. La prise en charge des femmes âgées atteintes d'un cancer du sein est un vrai problème, qui va devenir croissant. Malgré ce que l'on pense, la mortalité spécifique par cancer du sein est augmentée chez les femmes âgées, même si les autres causes de mortalité s'accroissent également avec l'âge. Nous savons tous maintenant que ce qui compte, ce n'est pas l'âge de l'état civil, mais l'âge physiologique, et qu'il est parfois utile d'avoir recours à un oncogériatre pour nos choix thérapeutiques, le score Oncodage nous aidant dans ces propositions de consultation adaptée. Traitons les femmes âgées au plus près des référentiels en tenant compte des comorbidités et en s'adaptant à chacune d'elles !


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M. Espié déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

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