Éditorial

Une seule santé : la nécessaire coopération entre médecine humaine et médecine vétérinaire pour prévenir les zoonoses


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Le terme “zoonose” vient du grec zόo, animal et de nόsos, maladie. Une zoonose est donc une maladie donc l’agent infectieux peut aussi bien contaminer l’Homme que l’animal. Il existe de multiples agents pathogènes pouvant être à l’origine d’une zoonose, comme une bactérie, un virus, un prion, un parasite ou un champignon. Le terme zoonose a été créé par le médecin Rudolph Virchow au XIXe siècle. Il fut un pionnier dans la compréhension de ces maladies.

On parle d’anthropozoonose quand l’infection ne peut se transmettre que de l’animal à l’Homme. L’infection peut être transmise de différentes façons : directement par contact avec les animaux, indirectement via des vecteurs, par ingestion d’aliments contaminés ou par inhalation. Une zoonose est dite bornée quand l’Homme est un “cul-de-sac sanitaire” et ne peut pas transmettre la maladie. A contrario, elle est dite extensive quand il peut transmettre à son tour le pathogène.

D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 60 % des agents infectieux entraînant des maladies chez l’humain proviennent du monde animal. Durant ces 30 dernières années, plus de 30 nouveaux agents pathogènes touchant la santé humaine ont fait leur apparition, dont 75 % sont d’origine animale. Dans le monde, selon l’OMS, 2,7 millions de personnes meurent chaque année de zoonoses (rage, VIH, fièvre Q, etc.). Parmi les maladies zoonotiques ayant fait le plus de victimes, nous pouvons citer le Covid‑19, la grippe espagnole et le VIH. L’émergence des zoonoses est favorisée par le rapprochement ou la domestication de certaines espèces animales. Bien souvent, les agents pathogènes affectant de manière symptomatique ou asymptomatique les animaux ont besoin de muter et d’évoluer pour ensuite contaminer l’Homme. Différents facteurs favorisent la propagation ou l’apparition de ces maladies :

  • Le réchauffement climatique entraîne une modification de la répartition de certains vecteurs. En effet, des étendues géographiques autrefois indemnes voient apparaître, avec l’augmentation des températures moyennes de 2 à 3 °C, des pathogènes qui n’étaient pas endémiques de ces régions. Les événements climatiques que nous avons connus récemment, comme les périodes de sécheresse ou les inondations, peuvent modifier le comportement des animaux, ainsi que leur habitat et provoquer une redistribution des pathogènes favorisant le développement des zoonoses.
  • La destruction des écosystèmes, telle que la déforestation, entraîne une perte de la biodiversité et force les animaux sauvages à se rapprocher des zones habitées, augmentant ainsi le risque de transmettre un pathogène aux humains.
  • L’utilisation à outrance de molécules antibiotiques engendre des résistances qui diminuent les moyens de lutte contre ces maladies.
  • L’expansion des villes mais aussi la mondialisation contribuent à propager rapidement certaines maladies qui restaient auparavant cantonnées à un continent.
  • Enfin, le commerce illégal ou légal des animaux est également un facteur facilitant la transmission de maladies zoonotiques.

Nous pouvons ainsi constater que le lien entre environnement, santé animale et santé humaine est très étroit et qu’un changement d’équilibre peut avoir de graves conséquences à l’échelle mondiale.

À l’heure actuelle, environ 30 % des pays dans le monde n’ont pas de système de surveillance des zoonoses. Pour éviter ces propagations, il faudrait uniformiser à l’échelle internationale la mise en place de dispositifs de surveillance, que ce soit dans les élevages ou dans les zones où l’interaction entre les humains et les animaux est forte, afin de déceler les signes précoces d’émergence de zoonoses. Parmi ces dispositifs, nous pouvons citer le Système d’alerte précoce et de réaction rapide (GLEWS), le Centre de gestion des urgences en santé animale (EMC-AH) ou le Réseau mondial d’alerte et d’action en cas d’épidémie (GOARN).

Des bonnes pratiques au niveau de l’hygiène dans les conduites d’élevage et de gestion des déchets de l’agriculture, mais aussi une réglementation plus stricte du commerce des espèces animales et végétales, ainsi que l’information des populations à risque sont autant de pistes pour lutter contre le développement de ces maladies.

À travers des épidémies telles que le Covid-19, Ebola, la rage, la grippe espagnole, les zoonoses représentent une menace majeure de santé publique à l’échelle mondiale, et cela d’autant plus que les moyens de déplacement sont grandement facilités pour les humains et les animaux dans un contexte d’évolution du climat et des habitats naturels.

Une prise de conscience mondiale sur l’importance d’une collaboration étroite entre les médecines humaine et vétérinaire associant des professionnels de l’environnement dans un concept d’“une santé” semble nécessaire pour prévenir et assurer une bonne gestion des zoonoses. Sans cela, il n’est pas exclu de voir apparaître dans un avenir proche de nouvelles épidémies zoonotiques allant de pair avec de nombreuses pertes humaines, animales et économiques. ●


Liens d'intérêt

Pierre-Louis Heus déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet éditorial.

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