Rougeole
L’alerte en France…
Alain Bandelli revient sur l’épidémie de rougeole de l’automne dernier en Ardèche et s’interroge sur les cas ayant affecté des sujets correctement vaccinés. Rappelons que, comme le détaille la Direction générale de la santé (DGS) [1] citée par Édith Louis, cette épidémie s’est déclarée en septembre dans un collège de la commune de Guilherand-Granges en Ardèche. Le cas index était un adolescent de retour d’un voyage en Indonésie, pays qui connaît actuellement une circulation virale active. La souche virale identifiée est couverte par les vaccins commercialisés en France, précise la DGS.
L’épidémie, majoritairement centrée sur le collège avec près de 9 cas sur 10, s’est toutefois diffusée dans un second temps à des personnes de l’entourage des collégiens (fratrie, parents, amis) qui, pour la grande majorité d’entre eux, n’étaient pas à jour de leur vaccination contre la rougeole.
À la date du 8 novembre, sur les 64 cas de rougeole recensés dans la région1, 40 % des sujets concernés étaient non vaccinés ou n’avaient reçu qu’une partie du vaccin ROR, et 60 % avaient reçu les 2 doses recommandées. L’étude des carnets de santé des enfants contaminés, alors qu’ils avaient pourtant un schéma vaccinal complet (2 doses) a montré que les trois quarts d’entre eux avaient reçu leur première dose avant l’âge de 12 mois.
Pour les experts, la vaccination précoce avant 12 mois entraîne une moindre immunité à long terme et pourrait donc expliquer la proportion importante de collégiens vaccinés ayant contracté une rougeole. La DGS précise que le taux d’attaque chez les collégiens vaccinés après 12 mois était de 3 % contre 10 % chez les vaccinés ayant reçu leur première dose avant 12 mois et de 100 % chez les non vaccinés, ce qui confirme l’excellente efficacité de la vaccination contre la rougeole.
La cellule d’expertise mise en place par l’agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes a recommandé un rattrapage vaccinal par une troisième dose de vaccin ROR chez les adolescents fréquentant les collèges des départements de la Drôme et de l’Ardèche ayant reçu une première dose avant l’âge de 12 mois.
…et en Europe
Au-delà de cette épidémie française, l’OMS alerte sur une hausse des cas de rougeole en Europe [2] : plus de 30 000 cas signalés dans 40 des 53 pays de la région entre janvier et octobre 2023, principalement en Russie et au Kazakhstan, soit une multiplication par 30 par rapport à 2022 (on dénombrait alors 941 cas). Au cours de cette période, la rougeole a été à l’origine de 21 000 hospitalisations et 5 décès ont été déplorés. Pour l’OMS, cette résurgence de la rougeole est largement imputable au recul de la couverture vaccinale dans les pays de la région entre 2020 et 2022, conséquence de la pandémie de Covid.
Selon le bulletin InfoVac de janvier 2024 [3], l’European Center for Diseases Prevention and Control (ECDC) rapporte à ce jour un peu plus de 2 000 cas de rougeole dans les pays de l’Espace économique européen (les 27 pays membres de l’Union européenne plus la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein) [4]. Le Royaume-Uni a également lancé l’alerte.
La France, qui bénéficie chez les nourrissons d’une couverture vaccinale proche de l’objectif à atteindre pour éliminer la maladie, dénombre un peu plus d’une centaine de cas en 2023, observent les experts d’Infovac, qui incitent néanmoins les médecins à vérifier le carnet de santé de leurs patients.
1 En 2022, 15 cas de rougeole ont été comptabilisés en France, 5 cas importés et 10 cas autochtones.
Augmentation des otites avec otorrhée
Alain Girard observe un nombre élevé, au regard des années précédentes, d’otites suppurées, caractérisées par un écoulement franc et massif, souvent unilatéral, et purulent. “Ces otorrhées ne sont pas toujours accompagnées de signes infectieux importants, mais sont difficiles à juguler et souvent récidivantes”, précise-t-il.
Un constat partagé par ses confrères et confirmé par François Vié le Sage, qui rappelle que ce sujet a été évoqué à la Journée de Pathologie infectieuse pédiatrique ambulatoire (PIPA).
Les germes en cause sont principalement le streptocoque A, Haemophilus influenzae et le pneumocoque.
Le Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique (GPIP) recommande, après avoir éliminé une otite externe, la réalisation d’un test de diagnostic rapide (TDR) du streptocoque A pour guider la thérapeutique (tableau) [5]. Si le test est positif, l’amoxicilline sera le traitement de première intention ; s’il est négatif, l’association amoxicilline-acide clavulanique est alors recommandée. ●