Adénocarcinomes œsogastriques HER2+ résécables : échec des anti-HER2 (études PETRARCA et RTOG 1010)
Le triplet de chimiothérapie FLOT est le traitement standard des adénocarcinomes œsogastriques (AOG) résécables (Al Batran S et al. Lancet 2019). En situation métastatique, le trastuzumab associé à un doublet de chimiothérapie par fluoropyrimidine et cisplatine est le standard chez les quelque 15 à 20 % de patients avec AOG HER2+ (positivité 3+ en immunohistochimie, ou 2+ avec hybridation in situ +) (Bang YJ et al. Lancet 2010).
Une étude de phase II prometteuse a montré un taux de réponse pathologique complète de 21,4 % chez 54 patients traités par FLOT + trastuzumab pour un AOG résécable HER2+ (Hofheinz RD et al. ASCO® 2014). L’étude randomisée de phase II/III PETRARCA a comparé une double inhibition HER2 par trastuzumab + pertuzumab (toutes les 3 semaines) en association au FLOT à la chimiothérapie seule dans cette population (abstr. 4502)(figure 1). Le critère de jugement principal de la phase II était le taux de réponse complète pathologique et celui de la phase III, la survie sans maladie. Malheureusement, l’étude a été interrompue au cours de sa phase II, à la suite de la publication des résultats négatifs de l’association trastuzumab, pertuzumab et chimiothérapie en 1re ligne métastatique (étude JACOB, Tabernero J et al. Lancet Oncol 2018).
Au total, 81 patients sur les 100 prévus pour la phase II ont été randomisés. L’association trastuzumab + pertuzumab a amélioré significativement le taux de réponse complète pathologique (35 versus 12 %, p = 0,02) (figure 2), ainsi que le taux de négativité (ou stérilisation) ganglionnaire (pN0 : 68 versus 39 %). Le taux de résection R0 a été similaire dans les 2 bras (93 versus 90 %). La médiane de survie sans maladie n’a pas été atteinte dans le bras expérimental (26 mois dans le bras chimiothérapie seule), mais il n’y avait pas de différence statistiquement significative pour la survie sans maladie ou pour la survie globale entre les 2 bras. La toxicité du bras expérimental a été non négligeable : diarrhée 41 versus 5 % pour la chimiothérapie seule, asthénie 23 versus 15 % et neutropénie fébrile 3 versus 0 %, respectivement. En revanche, la morbimortalité postopératoire n’a pas été majorée.
Il est dommage que cette étude ait été interrompue prématurément compte-tenu des résultats de réponse complète pathologique positifs. On attendra donc les résultats de l’étude de phase II randomisée INNOVATION (NCT02205047) promue par l’EORTC, actuellement en cours de recrutement, qui compare FLOT + trastuzumab et FLOT + trastuzumab + pertuzumab chez les patients avec AOG résécable HER2+.
L’étude de phase III du RTOG 1010 a évalué l’intérêt du trastuzumab en association à une radiochimiothérapie (RCT) préopératoire dans le traitement des adénocarcinomes du tiers moyen/tiers inférieur de l’œsophage et de la jonction œsogastrique résécables (50 % N+ non cœliaque, 10 % N+ cœliaque ≤ 2 cm) (abstr. 4500). Au total, 203 patients ont été randomisés entre RCT seule (50,4 Gy en 28 fractions + carboplatine/paclitaxel) ou associée au trastuzumab hebdomadaire, puis toutes les 3 semaines en postopératoire (13 cycles) (figure 3). Le critère de jugement principal était la survie sans maladie.
Après un suivi médian de 5 ans, les résultats de cette étude sont négatifs avec une médiane de survie sans maladie de 19,6 versus 14,2 mois (HR = 0,97 [0,69-1,36], p = 0,85) et une médiane de survie globale de 38,5 versus 38,9 mois (HR = 1,01 [0,69-1,47], p = 0,95) dans les bras avec et sans trastuzumab, respectivement (figure 4). Le taux de réponse pathologique complète était similaire dans les 2 bras de traitement (27 versus 29 %), de même que le taux de résection R0 (84 versus 81 %). L’association du trastuzumab à la RCT n’a pas augmenté de façon significative la toxicité cardiaque (5 versus 3 %).
Au total, la RCT préopératoire par carboplatine + paclitaxel (schéma CROSS, Shapiro J et al. Lancet Oncol 2015) reste un standard thérapeutique inchangé dans la prise en charge des ADK du bas œsophage ou de la jonction œsogastrique HER2+.