Est-ce que les anticorps conjugués vont remplacer les agents cytotoxiques classiques ?
Le trastuzumab emtansine (ou T-DM1) est un standard de traitement en deuxième ligne métastatique, et également maintenant en phase postopératoire lorsque les patientes ne sont pas en réponse complète histologique. Il permet ainsi de délivrer des agents antimicrotubules à forte concentration dans les cellules carcinomateuses HER2-positives. Pourrait-il remplacer avantageusement les taxanes en situation adjuvante ?
Cette étude de phase III (KAITLIN) avait donc comme objectif de tester le T-DM1 en comparaison avec un taxane, lors de la deuxième partie de la chimiothérapie adjuvante (après un cycle d’anthracycline), pour les cancers avec surexpression de HER2. Il s’agissait de forme à haut risque de rechute (avec envahissement ganglionnaire ou T2/RH-négatif). Ainsi, 1 846 patientes ont été incluses et ont reçu 12 mois de traitement anti-HER2 : soit taxane + trastuzumab + pertuzumab (THP) soit T-DM1 + pertuzumab (KP). L’objectif principal était double : l’amélioration de la survie sans maladie invasive (iDFS) pour l’ensemble de la population, ainsi que pour le sous-groupe des patientes N+.
Avec une médiane de suivi de 57 mois, il n’apparaît aucune différence significative d’iDFS, ni dans la population globale, ni dans la population des patientes avec envahissement ganglionnaire (HR = 0,97 ; IC95 : 0,71-1,32, p = 0,83). Aucun des sous-groupes testés ne semble bénéficier du T-DM1 par rapport au schéma classique TPH. Le T-DM1 aboutit par ailleurs à des toxicités qui font parfois arrêter ce traitement précocement. Cependant, la qualité de vie est détériorée de façon plus importante avec les taxanes que dans le bras KP.
Cette étude ne permet donc pas de placer le T-DM1 en remplacement des taxanes en situation adjuvante. L’excellente survie de cette population ne laissait, de toute façon, pas beaucoup de possibilité d’augmentation significative de l’iDFS (94 % à 3 ans dans le bras contrôle THP).