Étude IDEA : FOLFOX/CAPOX 3 ou 6 mois, le mot de la fin ?
[Voir zoom du jour]
Les résultats de l’étude collaborative IDEA (Grothey A et al. N Engl J Med 2018), totalisant 12 834 patients dans 6 études (figure 1) ont conduit, après un large débat, à un changement de pratique, devant la réduction significative de toxicité et le faible écart en survie sans maladie (SSM) à 3 ans (-0,9 %) avec une chimiothérapie adjuvante de 3 mois, malgré une non-infériorité par rapport au standard de 6 mois non strictement confirmée statistiquement.
Les résultats de survie globale (SG) et de SSM à 5 ans après un suivi médian de 6 ans, présentés cette année, pourraient maintenant clore le débat. Le bénéfice majeur du traitement de 3 mois en termes de tolérance se confirme, avec notamment une neurotoxicité de grade 2 à 4 trois fois moins fréquente, cliniquement pertinente compte tenu de la grande proportion de patients guéris (figure 2).
Les hypothèses statistiques de non-infériorité préspécifiées pour la SG établissaient la borne supérieure de l’IC95 du HR à 1,11, correspondant à une perte d’efficacité absolue inférieure à 2,26 % de SG à 5 ans. Même si les courbes de SG à 5 ans semblent superposées, la différence reste statistiquement significative avec une différence de 0,4 % (HR = 1,02 ; IC95 : 0,95-1,11 ; p = 0,058) (figure 3). Les différences rapportées initialement entre CAPOX et FOLFOX (non randomisés dans les études) persistent, le schéma CAPOX 3 mois étant démontré non-inférieur à 6 mois (delta +0,9 %), alors que 6 mois de FOLFOX restent supérieurs à 3 mois (delta -1,2 %) (figure 4). Une tendance similaire est observée pour la SSM à 5 ans, le schéma CAPOX 3 mois étant légèrement plus favorable et le schéma FOLFOX 6 mois significativement supérieur au FOLFOX 3 mois (figure 5). L’équivalence des schémas CAPOX 3 mois et 6 mois pour les faibles comme pour les hauts risques est confirmée, de même que le FOLFOX 3 mois reste significativement inférieur au FOLFOX 6 mois pour les hauts risques (figure 6). Ces résultats actualisés permettent d’évaluer précisément le rapport bénéfice/risque, avec au final pour une majorité de patients traités pour un cancer du côlon de stade III, une très faible perte de chance pour les schémas de traitement de 3 mois et, comme rapporté dans les résultats initiaux, un rationnel fort pour le choix de 3 mois pour le CAPOX, et de 6 mois pour le FOLFOX.
Vers une décision thérapeutique partagée avec le patient ?
Un modèle prédictif de l’impact respectif des différentes composantes du traitement (chirurgie, fluoropyrimidine, oxaliplatine 3 ou 6 mois) en fonction du stade a ainsi été confectionné à partir d’IDEA, constituant un outil utile en consultation pour partager la décision thérapeutique avec le patient (figure 7)(abstr. 4010).
Et les stades II à haut risque ?
L’étude ACHIEVE 2, seule étude asiatique des études IDEA dans les stades II à haut risque, trouvait comme les autres une non-infériorité du traitement adjuvant par CAPOX 3 mois par rapport à 6 mois avec une SSM à 3 ans de 88 %. En analyse multivariée, les 2 critères indépendamment associés à un risque élevé de rechute étaient le stade T4 (sans distinction entre T4a et T4b) (HR = 3,77, p < 0,0001) et le nombre de ganglions examinés inférieur à 12 (HR = 2,98 ; p = 0,0006), réduisant significativement la SSM (figure 8), sans interaction avec la durée de traitement (3 versus 6 mois).
L’analyse de ces critères sur l’ensemble des patients de l’étude IDEA classés stade II à haut risque, ce d’autant que certains sous-groupes sont peu représentés dans l’étude ACHIEVE 2 (perforation dans seulement 6,4 % des cas), pourrait renforcer ces résultats et permettre, à terme, de mieux sélectionner les patients au risque le plus élevé parmi les patients de stade II.