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Les cancers colorectaux vont devenir de plus en plus rares


Je t’imagine, cher lecteur, derrière l’écran sur lequel tu lis cet e-journal, me diagnostiquer une altération aiguë de mes fonctions intellectuelles, et subodorer qu’elle est sans doute due à l’effet successif du confinement, du déconfinement, puis de mon reconfinement dans ces locaux éditoriaux parisiens d’où je couvre cette édition virtuelle du congrès américain de cancérologie clinique. Las : rassure-toi, cher lecteur, il n’en est rien, et mes neurones se portent comme un charme (enfin je crois).

Or donc, qu’entends-je par ce titre énigmatique ? Ceci : il n’est plus de mise désormais de parler du cancer colorectal, mais bien plutôt des cancers colorectaux. Qu’on en juge par cette cuvée 2020 du congrès, avec la consécration, enfin, grâce à la phase III KEYNOTE-177, de l’immunothérapie en 1re ligne pour les quelque 5 % de cancers colorectaux métastatiques (CCRm) avec instabilité microsatellitaire (MSI) ; avec la confirmation, avec les résultats actualisés de l’étude BEACON, du doublet encorafénib-cétuximab comme nouveau standard de 2e ligne et plus pour les 5-10 % de CCRm BRAF mutés V600E ; avec l’avènement d’un nouvel anti-HER2, le trastuzumab deruxtecan, pour les 3 % de CCRm HER2 positifs (étude DESTINY). Voici donc 3 biomarqueurs prédictifs positifs, en ce qu’ils permettent de sélectionner un traitement ciblé. Mais même RAS, notre bon vieux biomarqueur prédictif négatif (il interdit les anti-EGFR lorsqu’il est muté), n’est pas en reste. Ainsi, l’essai PANDA trace les prémices chez le sujet âgé d’un schéma plus léger, “1 + 1” (panitumumab + 5FU monothérapie), comme challenger du “2 + 1” classique (FOLFOX-panitumumab), et partant du “1 + 1” capécitabine-bévacizumab. Et même le dogme du caractère notoirement “undruggable” de RAS se voit écorné (au moins dans l’intention), avec, par exemple, l’AMG 510, inhibiteur spécifique de la mutation minoritaire KRAS G12C, qui avait provoqué une certaine effervescence l’an dernier chez nos confrères oncologues thoraciques.

Bien sûr, il reste tant à faire. Comprendre les résistances ou les échappements à ces traitements ciblés. Développer des stratégies et des nouvelles molécules ou combinaisons de molécules pour circonvenir ces échecs. Et poursuivre nos efforts pour faire du fréquent cancer colorectal, sans cible, une constellation de cancers colorectaux rares, sensibles.

Capture d’écran 2020-06-01 à 17.57.26

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