Le Covid, l’enfant et les infectiologues pédiatres
Pour la troisième année consécutive, le congrès de l’ESPID (le 40e) est marqué du sceau du Covid-19. Certes, pour la première fois depuis 3 ans, il se déroule en partie en présentiel, mais 60 % des participants y assistent en distanciel. La marque du Covid-19 se manifeste aussi par l’importance des communications sur la pandémie : près d’un tiers d’entre elles lui sont consacrées, ainsi qu’à ses conséquences.
Globalement, aucune nouveauté n’est venue remettre en cause ce que l’on savait de la maladie.
La moindre gravité de l’infection à SARS-CoV-2 chez l’enfant, quel que soit l’âge, a été confirmée.
Avec les variants omicron, plus contagieux que la varicelle, les enfants sont définitivement aussi fréquemment infectés et infectants que les adultes. Ceci explique l’augmentation impressionnante des hospitalisations pédiatriques dans les pays développés, mais, au sujet de ces enfants hospitalisés, il faut cependant souligner que :
- 70 % sont des enfants de moins de 3 ans non accessibles encore à la vaccination et ne fréquentant pas les écoles ;
- environ la moitié sont des Covid fortuits ou accessoires : ce n’est pas l’infection à SARS-CoV-2 qui a conduit à l’hospitalisation, mais elle a été dépistée à l’occasion des tests réalisés à l’entrée pour chaque enfant hospitalisé en chirurgie, pour des problèmes psychiatriques ou pour des pathologies sans rapport avec l’infection à SARS-CoV-2 ;
- même en réanimation ou en unité de soins intensifs pédiatriques, un tiers des patients sont des Covid fortuits ou accessoires ;
- l’infection à omicron, même si elle est le plus souvent paucisymptomatique, peut entraîner chez l’enfant des épisodes fébriles un peu plus marqués, expliquant en partie la fréquence des hospitalisations chez les nourrissons (plus de 50 % des hospitalisés).
L’évolution des variants ne semble pas sur le point de s’arrêter, en particulier pour ce qui est d’omicron, qui comporte un lignage parental (B.1.1.529) et 5 sous-lignages : BA.1 à BA.5. En plus de ces lignages, des variants “hybrides” ont également été détectés. Ils sont signalés par la lettre “X” et sont issus d’une combinaison du matériel génétique de 2 virus différents lors d’une co-infection. XD, XF et XS sont des recombinants des variants delta et omicron (“deltacron”), tandis que XE, XG, XH, XJ, etc., sont des recombinants des sous-lignages BA.1 et BA.2 d’omicron (figure).
Le scénario le plus probable concernant l’évolution de la pandémie est celui d’une évolution permanente du virus, avec une sévérité de la maladie de moins en moins importante du fait de l’immunité acquise et persistante contre les formes graves. Cela n’empêchera pas des poussées épidémiques pour les formes les moins sévères et la nécessité probable de vacciner annuellement les populations les plus fragiles.
Néanmoins, 2 autres scénarios sont possibles. Un, plus favorable, est que les infections successives avec des variants moins virulents aboutissent à limiter la transmission des virus, sans nécessité de rappel annuel. L’autre, nettement plus défavorable, est l’émergence de variants plus dangereux, résistant même pour les formes graves à l’immunité acquise par l’infection et/ou la vaccination ; cela impliquerait de nouvelles campagnes de vaccination élargie avec de nouveaux vaccins.
Enfin, l'infection naturelle et les vaccinations protègent contre les formes sévères probablement pour des années. En revanche, les 2 ne protègent pas bien contre les formes asymptomatiques ou bénignes au-delà de plusieurs mois. En effet, la protection contre le Covid-19 peu sévère ou les formes asymptomatiques est médiée par des titres élevés d'anticorps neutralisants circulants qui ont une demi-vie assez courte.
En revanche, la protection contre les formes graves dépend essentiellement de l’immunité cellulaire qui, elle, chez l’individu immunocompétent, persiste très longtemps, notamment après la dose de rappel.
Il faut bien prendre conscience de la nécessité d’abandonner la politique de tolérance zéro et d'accepter des formes asymptomatiques ou peu sévères, comme nous acceptons des formes bénignes pour les autres virus respiratoires.