Améliorer l’efficacité du dépistage du cancer du col de l’utérus HPV-induit en France
En France, environ 3 000 nouveaux cas de cancer du col de l’utérus (CCU) sont diagnostiqués chaque année et sont responsables d’environ 1 100 décès. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 51 ans et de 64 ans au décès. Chaque année, le dépistage aboutit à environ 235 000 cytologies anormales (frottis) et à environ 31 000 lésions précancéreuses ou cancéreuses. Avec un dépistage optimisé, on estime que 80 % des CCU pourraient être évités. Quelles sont les pistes d’amélioration en France ?
Depuis les années 1990, le taux de mortalité du CCU diminue régulièrement. Cependant, pour les femmes les plus âgées, les courbes d’incidence et de mortalité se rejoignent comme si le dépistage faisait défaut (figure 1), c’est-à-dire que la mortalité due à ce cancer est aussi élevée, voire plus élevée que le nombre de nouveaux cas de cancer détectés dans cette population.
Plus surprenant encore, la survie à 5 ans est passée de 68 % en 1989 à 62 % en 2010. Trois facteurs sont mis en avant pour expliquer cette baisse :
- absence de dépistage dans 70 % des cas ;
- prise en charge inadéquate dans 20 % des cas ;
- mauvaise performance du dépistage dans 10 % des cas.
Inciter les femmes à être mieux suivies
Les recommandations françaises actuelles préconisent un dépistage par frottis cervico-utérin tous les 3 ans pour les femmes entre 25 et 65 ans, après 2 tests normaux à 1 an d’intervalle. Un dépistage cytologique (frottis) tous les 3 ans est la fréquence optimale. Or, près de 40 % des femmes ne se font pas ou pas assez régulièrement dépister, notamment les femmes âgées de plus de 50 ans, en lien avec l’arrêt fréquent du suivi gynécologique (ménopause, pas de grossesse, pas de contraception). Ce qui correspond précisément à l’âge moyen lors du diagnostic, de 51 ans.
Pour favoriser le dépistage chez toutes les femmes jusqu’à 65 ans, un programme organisé a été mis en place, avec l’envoi de courriers d’invitation et de relance et une prise en charge à 100 % de l’interprétation cytologique. Les données des prochaines années devraient refléter l’impact de ce programme.
Pour aller plus loin, le test HPV en première intention
Dans certains pays, le dépistage du CCU passe par la détection directe du virus responsable des lésions précancéreuses et cancéreuses (test HPV) en première intention. La cytologie (le frottis) n’est réalisée qu’en deuxième ligne. Associés ou non à la vaccination, les tests HPV favorisent une réduction des cancers du col et une amélioration de la survie. Concrètement, en Australie, le test HPV en dépistage primaire sur les HPV les plus fréquents est réalisé tous les 5 ans chez les femmes de 25 à 74 ans. Cela est moins coûteux que le dépistage par cytologie tous les 2 ans et surtout plus efficace. Même les coûts sont impactés, avec une réduction de 19 % sur une population non vaccinée et de 26 % sur une population vaccinée.
En France, à l’inverse de l’Australie et de la plupart des pays européens, le dépistage du CCU est actuellement toujours basé, en pratique, sur une analyse cytologique. C’est un outil de prévention efficace, mais le dépistage est souvent opportuniste et la sensibilité est limitée. Les autorités de santé françaises ont récemment recommandé la mise en place d’un test HPV en dépistage primaire, comme en Australie. Quelles en seraient les différentes étapes ? Lors d’un résultat positif (prévalence de l’infection de 10 à 12 % après l’âge de 30 ans,) du test HPV, un triage ou une stratification du risque, basé sur la réalisation d’un examen cytologique, sera effectué pour limiter les colposcopies inutiles, les surdiagnostics et les surtraitements, les dépenses abusives et l’inquiétude des patientes (figure 2). Un examen du col sous microscope (colposcopie) ne sera envisagé que si le frottis est également anormal. La seule exception serait la mise en évidence par le test HPV d’une infection par le type HPV16, situation où la colposcopie se discute d’emblée, sans passer par l’étape du frottis (pas de triage).
Le dépistage et la vaccination sont complémentaires dans la prévention du CCU. L’utilisation des tests HPV en première intention en France et l’obtention d’un taux de couverture vaccinale élevé permettraient de réduire encore l’incidence et la mortalité liées au CCU en France.
Attention, ce communiqué intègre des informations sur l’état actuel de la recherche présentées au sein du congrès EUROGIN 2019; ainsi, certaines données présentées sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités de santé françaises et ne doivent donc pas être mises en pratique. Toute prescription doit être conforme aux référentiels ANSM et HAS en vigueur en France. Le contenu est sous la seule responsabilité du coordinateur, des auteurs et du directeur de la publication qui sont garants de son objectivité. Communiqué réalisé à l’initiative de La Lettre du Gynécologue, avec la participation institutionnelle du laboratoire MSD.