Sécurité d’utilisation des morphiniques et des benzodiazépines à faible dose chez les patients insuffisants respiratoires oxygénodépendants
Dans une étude longitudinale prospective réalisée en Suède, S. Bajwah et al. ont évalué pour la première fois les risques d’hospitalisation et de décès associés à l’utilisation de morphiniques ou de benzodiazépines chez des patients atteints d’une pneumopathie interstitielle diffuse (PID) fibrosante traités par oxygénothérapie de longue durée (OLD) (1). L’étude a inclus 1 603 patients de 45 ans et plus issus du registre national de l’insuffisance respiratoire Swevedox ayant commencé une OLD entre octobre 2005 et décembre 2014, parmi lesquels 16 % (n = 252) exposés à des morphiniques et 12 % (n = 196) à des benzodiazépines. À l’inclusion, les patients exposés présentaient des paramètres fonctionnels respiratoires comparables à ceux des patients non exposés. Il n’a pas été retrouvé d’association entre la prise de morphiniques ou celle de benzodiazépines et l’existence d’un risque accru d’hospitalisation (SHR* = 1,18 ; IC95 : 1,01-1,38 pour les morphiniques – SHR = 1,21 ; IC95 : 1,00-1,46 pour les benzodiazépines). Concernant le risque de décès, celui-ci était augmenté pour la consommation de benzodiazépines à forte dose (SHR = 1,46 ; IC95 : 1,08-1,97), mais pas pour celle de benzodiazépines à faible dose (SHR = 1,13 ; IC95 : 0,92-1,38), de morphiniques à forte dose (≥ 30 mg/j de morphine orale ou équivalent - SHR = 1,22 ; IC95 : 0,99-1,50) ou de morphiniques à faible dose (SHR = 1,11 ; IC95 : 0,89-1,39).
Quelles implications pour la pratique ?
Les patients atteints de PID fibrosante à un stade avancé souffrent quasiment tous de dyspnée chronique, celle-ci pouvant alors être encore plus sévère que celle des patients atteints d’un cancer bronchopulmonaire en phase terminale (1, 2). L’étude présentée fournit des données inédites sur la sécurité des morphiniques et des benzodiazépines à faible dose alors utilisables à visée symptomatique, avec des résultats rassurants pouvant contribuer à lever les réticences à les prescrire souvent observées en pratique par crainte d’un effet dépresseur sur la commande ventilatoire (1, 3). De façon plus générale, elle permet également de rappeler l’importance actuellement accordée au développement des soins palliatifs dans le cadre des PID et à la mise en place d’études qui permettraient d’identifier le modèle de soins le plus approprié pour les patients (2). À cet égard, signalons qu’en France, un programme hospitalier de recherche clinique intitulé PALIF est actuellement en cours sur cette thématique (ClinicalTrials.gov Identifier : NCT03229343), avec pour objectif d’évaluer l’Impact sur la qualité de vie d'une intervention palliative systématique dans la FPI avancée (4).
* Hazard-ratio de sous-distribution d’après le modèle de régression de Fine-Gray.
20-0072-02/2020 Boehringer Ingelheim France SAS
Références
1. Bajwah S et al. Safety of benzodiazepines and opioids in interstitial lung disease: a national prospective study. Eur Respir J 2018;52(6). pii: 1801278
2. Kreuter M, Bonella F, Wijsenbeek M, Maher TM, Spagnolo P. Palliative care in interstitial lung disease: living well. Lancet Respir Med 2017;5:968-80.
3. Finney LJ. Is it safe to prescribe benzodiazepines or opioids for dyspnoea in interstitial lung disease? Breathe (Sheff) 2019;15:137-9.
4. Cottin V. Fibroses pulmonaires : 20 ans de progrès et d’innovation. La Lettre du Pneumologue 2018;XXI(1):48-56.